Regards sur l'éveil
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scientifique
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Posté
le: Sa 14 août 2004 par joaquim
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La contemplation
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J’avais
gardé de mes cours de philo l’image d’un Schopenhauer pessimiste
et
grincheux. J’étais bien loin d’imaginer que derrière
cette image
académique se cachait celui qui a eu ces mots lapidaires et
définitifs: «Chacun
est heureux, quand il est toutes choses ; et malheureux, quand il n’est
qu’individu.»
C’est à lui aussi que l’on doit cette description
concrète et technique
du processus qui conduit à l’éveil, selon une voie que
l’on pourrait
appeler contemplative:
«
Lorsque, s’élevant par la force de
l’intelligence, on renonce à considérer les choses de
façon vulgaire ;
lorsqu’on cesse de rechercher à la lumière des
différentes expressions
du principe de raison les seules relations des objets entre eux,
relations qui se réduisent toujours, en dernière analyse,
à la relation
des objets avec notre volonté propre, c’est-à-dire
lorsqu’on ne
considère plus ni le lieu, ni le temps, ni le pourquoi, ni
l’à-quoi-bon
des choses, mais purement et simplement leur nature ; lorsqu’en outre
on ne permet plus ni à la pensée abstraite, ni aux
principes de la
raison, d’occuper la conscience, mais qu’au lieu de tout cela, on
tourne toute la puissance de son esprit vers l’intuition ; lorsqu’on
s’y engloutit tout entier et que l’on remplit toute sa conscience de la
contemplation paisible d’un objet naturel actuellement présent,
paysage, arbre, rocher, édifice, ou tout autre; du moment qu’on
se perd
dans cet objet, comme disent avec profondeur les Allemands,
c’est-à-dire du moment qu’on oublie son individu, sa
volonté et qu’on
ne subsiste que comme sujet pur, comme clair miroir de l’objet, de
telle façon que tout se passe comme si l’objet existait seul,
sans
personne qui le perçoive, qu’il soit impossible de distinguer le
sujet
de l’intuition elle-même et que celle-ci comme celui-là se
confondent
en un seul être, en une seule conscience entièrement
occupée et remplie
par une vision unique et intuitive; lorsqu’enfin l’objet s’affranchit
de toute relation avec ce qui n’est pas lui et le sujet, de toute
relation avec la volonté : alors, ce qui est ainsi connu, ce
n’est plus
la chose particulière, en tant que particulière, c’est
l’Idée, la forme
éternelle, l’objectivité immédiate de la
volonté ; à ce degré par
suite, celui qui est ravi dans cette contemplation n’est plus un
individu (car l’individu s’est anéanti dans cette contemplation
même),
c’est le sujet connaissant pur, affranchi de la volonté, de la
douleur
et du temps ». Arthur SCHOPENHAUER, Le Monde comme Volonté
et comme
Représentation, PUF, Paris, 1966, § 34, pp. 230-231.
Schoppenhauer propose là une "technique" qui serait en soi
à même de
provoquer l'éveil; toutefois, celui qui serait parvenu à
l'éveil à
l'aide de cette "technique" l’aurait fait en sacrifiant celui qui
voulait le provoquer, si bien qu’en fin de compte personne ne sera
là
pour prétendre avoir provoqué quoi que ce soit. Seulement
une présence
touchée par la grâce. En un sens, il n’est pas tellement
important de
savoir quelles sont les motivations qui nous animent dans notre
recherche de l’éveil, quelle est leur degré
d’élévation, car en
dernière analyse, elles se révéleront toujours
égoïstes; pourvu qu’elle
nous aident à nous mettre en route, cela seul compte; le reste
n’est
plus qu’une question d’abandon à ce qui vient.
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