Regards sur l'éveil
Café philosophique, littéraire et
scientifique
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Posté du 28
juillet 2007 au 3 janvier 2008 par Renaud
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Mirage
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On peut dire que l'ego est une illusion, et
partant de là que sa disparition relève du mythe, c'est parfaitement
tenable. Je préfère mettre en avant qu'une illusion n'est pas forcément
quelque chose qui n'existe pas.
Par exemple, l'eau que l'on peut foir sur une route écrasée de
soleil... un mirage commun ! Bien sur il n'y a pas d'eau, mais une
caméra la verrai aussi bien que notre oeil : il y a eau illusoire, mais
image réelle.
Cette eau que l'on voit résulte d'un phénomène physique bien réel.
L'eau n'existe pas, mais l'image de l'eau oui. De la même manière on
peut dire que l'ego est une image produite dans la conscience par nos
processus cognitifs/psychiques, image aussi réelle que celle de l'eau
sur la route, mais dont la teneur est parfaitement illusoire.
Pour moi l'éveil n'a rien a voir avec la chasse a l'ego, et un
éveillé n'est pas plus dépourvu d'ego que le commun des mortels. Cette
métaphore du mirage pourrait donner une image de ce dont il s'agit :
l'éveillé sait, par intime expérience, la nature illusoire de cet ego
que tout un chacun prend dramatiquement au sérieux. |
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Qui est le "je" qui atteindrait l'éveil
dont tu
parles ? Et quel est-ce "moi séparé" ? Tout repose sur le rapport entre
les deux...
Image : "Je" est un lecteur captivé par un fabuleux roman,
s'identifiant totalement à un personnage de l'intrigue appelé "moi".
Dans cette histoire il arrive des tas de choses à "moi", qui entre
autres recherche l'éveil et va connaître des expériences
transcendantes. Et "je" adhère totalement à ces captivantes aventures
"intérieures". Sauf que le personnage du roman reste à tout jamais un
personnage et ne peut connaître l'éveil, puisque le véritable éveil
serait que "je" réalise que je suis en train de me prendre pour un
personnage du bouquin. Cela peut arriver, mais ce n'est pas "moi" (le
personnage) qui le fait, c'est quelque chose qui arrive à "je" (le
lecteur) indépendamment du récit.
En fait tu sembles considérer que "je" cherche à s'éveiller, ce qui
mettrait fin à "moi". De mon côté, je préfère considérer que "moi"
cherche à s'éveiller, ce qui est mission
impossible car l'éveil concerne le lecteur et non le
personnage. |
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Il se pourrait bien que rien n'ai
de sens... les choses ont le sens que nous leur donnons, avant tout.
C'est une exigence primaire de notre psychisme que de donner du sens,
et une cause profonde de souffrance. D'ailleurs si l'on se penche sur
les principaux témoignages "fiables" d'éveil, on retrouve ce point
commun : la fin du pourquoi,
pas parce qu'on sait, mais parce que le besoin de maîtriser et de
savoir s'efface, cédant la place non à l'ignorance ou à la croyance
mais à la toute simple "foi", à la pure confiance. |
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Mais comme tu le mets dans cette
perspective, permets moi de préciser quelque chose : l'illusion
(omniprésente certes) est quelque
chose de réel,
ce n'est pas un pur mensonge, une pure hallucination, mais plutôt un
défaut d'interprétation/perception. Je veux dire par là que ce n'est
pas une négation de ce qui est vécu.
Malheureusement beaucoup réagissent à cet énoncé comme le type cloué au
lit par un ulcère à qui on dit "C'est
psychologique, c'est le stress mon bon monsieur"...
et ça se comprend ! Dans les deux cas on entend en fait "imaginaire",
"irréel", alors que ce n'est pas du tout ce que ça signifie. Le type
avec son ulcère a réellement mal, et un bon traitement est parfaitement
indiqué, alors même que la cause est bel et bien psychologique (et
qu'il faut agir aussi
sur ce terrain).
Alors je te rejoins : oui, la soufrance est
vécue et il est légitime de vouloir la combattre. La nature est
cruelle, et nous le sommes largement autant, mais nous nous avons cette
conscience
de nos actes et de la souffrance qu'ils peuvent engendrer... avec cette
responsabilité (assumée ou non) qu'elle engendre. |
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Pour moi, personne ne cherche réellement
l'éveil
"pour de vrai" (pour ce qu'il est réellement), et aucun chemin ne
permet de réaliser l'éveil. Pourtant il est parfaitement légitime de
chercher ce que l'on conçoit comme l'éveil. Et si l'on a cette
aspiration, prétendre ne rien faire en guise de voie n'est jamais, au
mieux, qu'essayer de ne
pas essayer, et au pire un moyen malhonnête (envers
soi-même) de laisser tomber en se donnant bonne conscience.
Les pratiques dites spirituelles, même si je leur récuse tout
intérêt vis a vis de l'éveil tel que je le conçois, on un très grand
intérêt dans notre chemin de personne. Devenir conscient, plus lucide,
plus ouvert, se réveiller et se défaire de certaines illusion ou
mécanismes aliénants... la pratique spirituelle est riche de bienfaits.
Cette maturation peut éventuellement amener à un point où l'on se
heurte au paradoxe de la recherche, a la vanité du questionnement, ce
qui peut à son tour être une occasion pour l'éveil de se produire. Mais
d'une part rien ne le garanti, et d'autre part il peut survenir dans un
cadre tout autre.
A un moment, on peut poursuivre cette quête de l'éveil tout en
sachant qu'elle n'y mène pas, et sans que ce soit un renoncement. Je
dirais que cela décrit assez bien mon chemin.
C'est un peu comme travailler un instrument en sachant que ce n'est pas
ça qui fera de nous un Chopin.
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La question ne cesse que lorsque soit on adopte un
système de croyance qui la satisfait, soit on la pousse
dans les derniers retranchements qui l'amènent à désamorcer l'idée même
qu'il y a une question, soit
on vit une "expérience d'éveil". |
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Pour parcourir notre chemin spirituel, on
utilise tous selon nos moyens une Clio, une Mercedes, un vélo ou nos
fidèles petons, pour finir par découvrir qu'au fond on ne va jamais
nule part, puis qu'on est toujours... là ! Alors si je jalouse la BMW
du voisin, si je fais des économies pour troquer mon vélo contre une
moto, si je maudit les affreux polueurs en SUV, ou si je roule avec
bonheur en Porsche Cayenne.... fort bien ! C'est le jeu de la vie.
Le mic-mac de l'éveil c'est la même chose. On peut ergoter à
l'infini sur les véhicules, leur coût, leurs qualités, mais au final le passager est toujours à sa place,
quel que soit le véhicule employé. |
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Si le message de Ramana Maharshi t'inspire
c'est
très bien, et tu peux parfaitement suivre ses "recommandations". De
toute manière rien ne t'évitera de suivre ton cheminement... aucun de
nous, ici, n'a de méthode miraculeuse à te révéler. Par contre tu
trouveras, en creusant dans les messages, plein d'indications et de
questionnements qui pourront peut-être te donner des pistes.
En particulier, tu découvriras qu'il n'y a en fait rien à faire...
mais que cela ne prends sens que lorsque tu en aura déjà fait pas mal !
La quète ne produit pas l'éveil, mais on ne peut pas pour autant faire
l'économie de cette recherche. Alors bon cheminement à toi !
Toutes ces pistes que tu croisera, d'une manière ou d'une autre, te
diront qu'en fait on ne trouve pas le Moi, on démasque seulement les
erreurs, les identifications fallacieuses... un peu comme ce silence
que l'on ne peut pas faire : tout ce qu'on peut, c'est arréter de faire
du bruit.
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