Être ou ne pas être “je”
Dire “je”. Être un “je”. Réaliser qu’on existe. Être le sujet d’une existence. Faire briller l’être en le découvrant “être pour soi”. S’étonner. Voilà le mot. Il faut être un “je” pour s’étonner. Ou bien est-ce l’affleurement d’un étonnement sur l’eau lisse de la conscience qui crée “je”? Oui, c’est peut-être bien cela. Une irrégularité dans la machinerie bien huilée des enchaînements mentaux, un accroc qui frappe, qui étonne. Et qui s’étonne. S’étonner d’être étonné. Voilà ce qui fait “je”. Une boucle qui se génère elle-même. La boucle étrange, comme la nomme Hofstadter. Une boucle totalement autonome. Tout peut la nourrir, n’importe quoi peut alimenter son étonnement, mais l’étonnement lui-même n’est dépendant de rien, il est entièrement sien, rien que sien. Il est vide de tout, hormis soi. Il est “je”, et rien d’autre. Il est du coup aussi “rien”. Et cela redouble son étonnement. Se découvrir n’être “rien” conduit l’étonnement qu’est “je” à sa pointe extrême. L’étonnement abyssal de n’être qu’un paradoxe. Une énigme dont la seule solution semble résider dans sa propre disparition. Accepter la vérité de n’être “rien”, cela ne pourrait, en toute logique, vouloir dire que disparaître. Et pourtant, accepter de n’être “rien”, et le faire, ne conduit nullement à disparaître, mais au contraire à intensifier l’étonnement, à lui donner toute latitude, et à devenir ainsi d’autant “plus” qu’on accepte de n’être “rien”. L’accepter totalement, s’abandonner tout entier à l’évidence de n’être rien, c’est se couler dans la vie qui nous crée, c’est devenir la vie par laquelle l’esprit “se” crée.
Certains prétendent que “je” aurait disparu de leur monde. Etonnant, non? Auraient-ils ainsi perdu la capacité de s’étonner? N’y a-t-il en eux plus d’étonnement à être étonné? Ils prétendent ne plus abriter le moindre “je” qui fasse obstacle à ce qui les traverse. Ils seraient devenus “ce qui est”. Tout ce qu’ils expriment ne serait plus “eux”, mais une parcelle du grand Tout dont ils font partie. Il n’est plus possible de les prendre à partie, car il n’y a plus nul “tu” face à soi, mais seulement un écho qui questionne la vanité du “je” qui s’étonne devant eux. Ils se donnent comme ayant trouvé la réponse en supprimant le questionneur. Et pourtant ils continuent de parler, de répondre à des questions (eux-mêmes n’en ont plus), en annulant le questionneur dans leur interlocuteur. Ne voient-ils donc pas qu’annuler le “tu” auquel ils s’adressent, loin d’être un geste silencieux qui ferait retourner la question au silence, est au contraire un geste bruyant qui nie précisément “ce qui est”. Car qu’y a-t-il au monde de plus essentiel que “toi”? Pourquoi continuent-ils d’ailleurs à parler, si ce n’est parce que, pour eux aussi, “toi” compte tellement?
Non, la négation ni la soustraction ne seront jamais une solution. On ne peut pas retrancher de l’être. On ne peut que l’assumer. Le paradoxe que “je” suis ne se résout pas par ma disparition, mais par ma découverte. Découvrir que celui qui me crée, celui qui crée mon être, c’est “je”. Et parce que cette découverte passe par l’acceptation inconditionnelle de n’être “rien”, elle apparaît aussi comme la solution non seulement vécue, mais aussi logique, de mon propre paradoxe.
Publié dans: Éveil, Paradoxes par joaquim, le 29 décembre 2008 à 4:01
Daniel, tu dis ” grâce au lacher-prise … il n’y a plus, ni l’envie, ni le besoin de “prendre avec” ! pis, il y a beaucoup de questions, qui ne se posent plus …”
Tu as raison de préciser et de souligner…Lorsque j’écris “com-prendre”, avec ce tiret et ces guillemets, c’est exactement a cette attitude intérieure là que je fais référence: celle de l’ acceuil de ce qui se donne a connaitre, sans les a-prioris, ni les réticences ou les jugements qui se greffent sur les certitudes nées de nos saisies mentales…
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nad dit :
“Daniel, tu écris:
“c’est, surtout, l’angle de “vue” qui change !”
Oui c’est ça: un changement de “point de vue”…C’est toujours “l’angle de vue” qui change tu ne crois pas?
Ce qu’on appelle l’Eveil, est ce vraiment autre chose qu’un changement drastique de perspective?
”avec la relation entre le sujet et les objets (les sensations), apparaît la connaissance “Je”, “Je Suis” … c’est ce qui est connu qui révèle ce qui connaît …”
Et c’est cela qui soudain donne tout son sens sacré à la manifestation, au monde et à la vie, non?
L’absolu n’a de “sens” et de réalité que par rapport au relatif, n’est ce pas?”
un changement de “point de vue”, on peut dire ça, oui !! ha ha !
un changement complet, et, principalement, parce qu’il n’y a plus d’enjeu ! plus d’objectif à atteindre … plus rien qui ne soit mis en perspective, tout simplement, parce qu’à partir du moment où l’on adhère plus à la dualité, tout n’a plus court … on dira, c’est devenu obsolète, qu’on ne peut plus envisager de perspective pour quelque chose qui ne tient à rien (d’illusoire) …
plus que de donner son sens sacré à la manifestation, au monde, à la vie, je dirai que cela fait de la manifestation, du monde et de la vie, des “phénomènes” incontournables, prenant toute leur valeur, puisqu’ils révèlent le Sujet à Lui-même … d’où, effectivement, l’absolu n’a de “sens”, de (Sa) valeur et de réalité que par rapport au relatif …
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j’ajouterais qu’arriver ici, l’on peut se demander si il y a Constat (concernant l’absolu et sa manifestation) ou bien, si, il y a là Volonté, Dessein … bref, une approche plus idéaliste, ou tout cela participerait d’une certaine évolution (pour l’humanité, le monde, la vie, l’univers) … mais je ne le “crois” pas …
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”
“un changement complet, et, principalement, parce qu’il n’y a plus d’enjeu ! plus d’objectif à atteindre … plus rien qui ne soit mis en perspective, tout simplement, parce qu’à partir du moment où l’on adhère plus à la dualité, tout n’a plus court … on dira, c’est devenu obsolète, qu’on ne peut plus envisager de perspective pour quelque chose qui ne tient à rien (d’illusoire
”
D’ou le mot drastique!
Et pourtant c’est paradoxal,n’est ce pas car ce “quelque chose d’illusoire qui ne tient a rien” c’est pourtant exactement comme tu le dis plus loin ce qui révèle le sujet a lui même et donne sens a l’absolu..
” cela fait de la manifestation, du monde et de la vie, des “phénomènes” incontournables, prenant toute leur valeur, puisqu’ils révèlent le Sujet à Lui-même … d’où, effectivement, l’absolu n’a de “sens”, de (Sa) valeur et de réalité que par rapport au relatif …”
Et dans cette confrontation aux phénomènes au cours de laquelle le Sujet se révèle a lui – même d’instant en instant, dans ce “par rapport” permanent, qui fait émerger le réel, que se passe -t-il donc?
Pas de but , pas d’objectif,pas de perspective,rien a atteindre , cependant quelque chose se passe, non?Quoi?
Paradoxe!
Cette “vision “là, est ce une “perspective” ou n’en est ce pas une?
C’est en tout cas celle d’une vision globale,de l’unité indissociable de l’absolu et du relatif,
Et c’est dans ce sens que je dis que cela rend “sens sacré de la manifestation”….
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j’apprécie beaucoup la tulipe, en haut à droite … elle est très vivante … à chaque fois que je me connecte au blog, j’ai l’impression qu’elle a bougée … je ne la retrouve jamais au même endroit que quand je l’ai quitté !
elle donne toute son sens, à la manifestation !
effectivement, l’absolu et sa minifestation sont in … (je ne parviens pas à retrouver le mot, et c’est ni intrinsèque, ni insécable il voudrait dire, “imbriqués l’un dans l’autre”, indissociabale …) …
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ha ha ha ! ben, je crois que le mot que je cherchais, c’est “intriquéEs” … l’absolu et sa manifestation sont intriquéEs !
c’est ça !
@ la prochaine !
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Salut daniel !
Merci pour tes clins d’oeil, et pour tes précisions. 😉
Effectivement, intriquées. Du plus étroitement qu’on puisse imaginer, comme sont intriquéEs le silence et la musique, les couleurs et la lumière.
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“Du plus étroitement qu’on puisse imaginer, comme sont intriquéEs le silence et la musique, les couleurs et la lumière.”
Et inclut la place de cet étrange “facteur” que nous sommes, cet espace de conscience qui est exactement à cet interface entre le silence et les notes de la musique, la lumière et les couleurs qui en émergent.
Non?
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Bonjour Joaquim,
J’ai lu tes mots, j’ai vagabondé et rebondi sur eux, sans être sûr d’avoir tout saisi… Mais « je » m’en fiche, c’était rafraîchissant quand même.
Peut-être recommencer à planter ailleurs…
Amitiés
Pierre
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Bonjour Pierre,
Quelle surprise, et quel plaisir ! Te voir réémerger des gouffres insondables du net… Rafraîchissant, dis-tu? J’apprécie le compliment, vraiment. As-tu quelque part des plantations? Je serais heureux de m’y promener.
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Bonjour,
Comme je me suis levé tot ce matin, j’ai eu du temps pour lire ce fil très long et très interessant.
Concernant le ” je “, le problème ne vient-il pas en fait d’une forme de dualité créé par le mental ? On ne peut pas s’abstraire de celui ci dans la relation intellectuelle et dans le désir d’échanger.
Ne créé t-on pas déja des séparations lorsque l’on parle d’éveil ? celui qui n’est pas évéillé se retrouve alors obligatoirement dans un état de non-éveil.
Il y a au moins deux manières d’appréhender le ” je “. Pourquoi l’une serait plus juste ou plus réelle que l’autre ?
Il y a le ” je pensée ” : celui la est mental puisqu’il est constitué par la mémoire. Pour on ne sait quelle raison cela c’est constitué dans l’univers: une résistance au temps. Ce ” je ” est conceptuel. En termes de relatif il n’y a aucun problème. Voila, je suis untel ou untel et c’est mon histoire qui me définit. Histoire faite de multitudes et multitudes de relations entre ” moi ” et ” l’autre “. Mais c’est évident, lorsque ce “je pensée ” tente de définir en tant qu’existant absolu, il se heurte inévitablement aux barrières dressées par son existant relatif. Je vais me prouver que j’existe, se dit-il, en m’isolant de ce flot mobile des penseés, en me rendant immobile. C’est bien sur un non sens. Mais comment pourrait-il envisager le problème autrement ? Je veux devenir présent à moi meme, mais je me retrouve toujours un peu en marge de ce présent, un peu avant, un pau après, puisque ce qui me définit c’est justement le mouvement…Pour autant, puis-je en conclure: je n’existe pas ? Ma mémoire est réelle, et il y a donc bien y avoir en moi un fondement de réalité puisque je ne me suis pas fait tout seul…c’est le monde qui a décidé pour moi. J’existe bel et bien, sur un plan relatif.
Et puis il y a le ” je action ” : celui ci ne se pose plus du tout le problème de l’existence de la meme façon. Il n’a que faire du désir et du souci de se localiser puisqu’il ne se considère pas en dehors du mouvement, il est ce mouvement. Rien alors de ce qui tracasse le ” je pensée ” ne peut vraiment l’atteindre puisqu’il se sait mouvement: il ne cherche plus à avoir mais simplement il est.
Ces deux formes de la réalité, etre et avoir, pensée et action, immobilité et mouvement, ont bien du mal à s’entendre. Mais je crois que si elles acceptaient vraiment de cohabiter, notre moi se libererait de beuacoup d’oppositions. Si nous acceptions de nous voir et de nous considerer aussi ” réels ” en tant que pensée et action, aussi réels en tant qu’etres mentaux et ames absolues, aussi réels dans le relatif – l’avoir – que dans l’absolu – l’etre – alors beaucoup d’oppositions tomberaient d’elles memes. Si nous acceptions de ne plus établir de hiérarchie entre ce que nomons ” illusion ” et ce que nous nomons ” vérité “, cherchant alors incessamment à fuir de l’une pour s’élever jusqu’à l’autre, bien des problèmes de la réalité seraient réglés.
Nous pourrions en conclure alors sur ce que nous sommes sans oppositions: mémoire, mental, vie, relations – et la beauté d’une existence c’est aussi qu’elle est éphémère et limitée dans le temps – mouvement, energie, absolu, universalité – et la beauté d’une existence relative c’est qu’elle peut aussi se découvrir absolue -.
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Bonjour toniov,
Oui, bien sûr, tu as raison, les deux “je” sont vrais. Et je pense comme toi qu’on ne saurait résoudre le problème en décrétant que l’un (celui qui pense) serait illusoire. Ce serait d’autant plus regrettable que c’est précisément celui qui pense qui est le porteur de la conscience d’être, et donc le balancer par-dessus bord, ce serait cesser d’être conscient. Simplement, celui qui pense se trompe sur lui-même. Il croit se connaître, il est sûr, absolument sûr de savoir “qui” il est, sans jamais se rendre compte que ce qu’il prend pour lui, ce n’est que le résultat de sa propre manifestation. Il ne le voit pas, parce qu’il dort. Il ne sait pas qu’il est vivant. Il ne sait pas qu’il est une chose qui bouge, et que les mouvements de cette chose, c’est l’explosion de l’être.
Tu dis: « Si nous acceptions de ne plus établir de hiérarchie entre ce que nomons ” illusion ” et ce que nous nomons ” vérité “, cherchant alors incessamment à fuir de l’une pour s’élever jusqu’à l’autre, bien des problèmes de la réalité seraient réglés. » En fait, je crois que si des problèmes se posent, c’est parce que nous sommes scindés, justement. Parce que nous nous méprenons sur nous-mêmes. Dans ce sens-là, il est salutaire que ces problèmes se posent, sans quoi rien ne nous inviterait plus à nous secouer. Car pour ma part, ce n’est qu’en se secouant, en devenant intérieurement vivants, en intensifiant notre présence jusqu’à ce qu’elle éclate dans toutes choses, que nous résoudrons notre propre scission.
Mais tu as peut-être raison : accepter de ne plus juger est peut-être aussi un chemin vers la sortie. Parce que c’est une attitude qui ne va pas de soi, parce qu’en suivant la pente de notre sommeil, nous sommes fatalement inclinés à nous satisfaire de jugements, qui sont comme des coussins pour notre paresse, et que d’y renoncer nous oblige à nous redresser, à nous mettre face à ce qui est là, présents sans rien saisir, et que le faire, vraiment, c’est s’éveiller.
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C’est à dire que notre vie puise puise son expression à deux sources: celle de l’avoir et celle de l’etre. Peut etre ai je tort mais j’ai le sentiment que la confusion vient du fait que nous ne nous satisfaisons pas de cette double appartenance au monde. Nous y voyons une dualité et nous cherchons au dela d’elle l’unité. Mais le monde est déja un et c’est nous qui voyons dans ses oppositions des contraires irréductibles, un peu comme si nous devions choisir, scéance tenante, entre la nuit et le jour ou l’ombre et la lumière. Si le monde est un c’est qu’en lui ses opposés ne peuvent etre contradictoires; ils sont complémentaires.
L’etre et l’avoir ne sont pas de meme nature mais ils sont bien réels tous les deux, constituants du monde en la personne humaine. Mais l’avoir ne sera jamais etre puisqu’il ” a “, et l’etre ne sera jamais avoir puisqu’il ” est “. Pourquoi faudrait-il faire un choix ? N’est ce pas le choix qui fait naitre la dualité ?
Simplement dans l’existence, il me semble qu’on est sans cesse confronté à cette réalité de l’etre et de l’avoir. On “a ” une idée a exposer, un projet a mener à terme, une personne à rencontrer, un loyer à payer, un choix artistique, social, politique. On ” est ” un geste, un regard, une action.
L’avoir est de l’ordre du mental. Sa meilleur définition c’est de construire le monde en idées, les plus belles et les plus juste possible.
L’etre est de l’ordre de l’action. Sa meilleure ” définition ” c’est aimer; l’acte d’aimer.
Qu’en penses tu ?
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Je pense que la réflexion peut conduire à identifier toujours mieux les paradoxes auxquels nous conduit l’examen sans concession de notre propre conscience, mais je suis convaincu aussi que jamais elle ne pourra les résoudre. La seule chose qui puisse les résoudre, pour ma part, c’est un face-à-face avec soi-même, dans la solitude de son propre silence. Je repense à ces mots de Kierkegaard postés sur l’ancien café-éveil : « La vérité éternelle essentielle n’est pas du tout en elle-même paradoxale, mais elle n’est telle que dans son rapport avec un sujet existant. »
Cf. : http://www.cafe-eveil.org/archives/soeren-kierkegaard.html
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Je vois ce que tu veux dire: il faut donc continuer ce face à face avec soi meme, ” sans concession de notre propre conscience “. C’est ce que je fais.
Et je note ce passage du lien que tu m’as adressé:
“Accepter de ne pas saisir la vérité, accepter de demeurer dans le brouillard, dans l’incertitude; mais le faire non pas passivement, mais avec toute la passion dont on est capable. Alors on devient intensément présent, tout en s’oubliant à la fois. C’est cela, l’éveil.”
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toniov : “C’est ce que je fais.”
Alors pardonne-moi d’avoir insisté si lourdement. 😉
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C’est vrai que tu as insisté…mais pas lourdement.
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J’ai pas eu le temps de tout lire (mais une bonne partie. Je réagis. J’emets une hypothèse.
Ce n’est pas du monde extérieur mais bien de la modélisation du monde extérieur dans notre cerveau que nous faisons l’expérience. Appelons les objets de cette modélisation, symboles. Les symboles sont des configurations précises d’activation nos neurones pour chaque pensée. Je crois que ce système de modélisation possède une motivation de base qui est sa propre survie. En schématisant, on pourrait dire que le système n’existe que pour continuer à exister dans cet univers. La modèlisation de cet univers, ce qui est pris pour la vérité du monde est ce qu’on appelle les croyances. Ce système cherche alors la survie de sa mémoire, la survie de son corps, la survie de sa famille, la survie de l’humanité etc. Ca dépend à quoi s’identifie le système. Il modélise l’extérieur et se modélise lui même pour générer un comportement adapté à la situation. C’est de cette modélisation de lui même que naitrait la conscience (phénomène émérgent – cf le tout vaut plus que les parties) : le “Je”. Tout ce qui n’est pas conscience étant inconscient. Une partie de cet inconscient sont des symboles en sommeil dans notre cerveau qui sont potentiellement réactivables dans le futur. Pour continuer sur alors sur cette voie, c’est-à-dire la survie du système de modélisation, il s’agirait de modéliser au mieux la réalité, ce que nous faisons à travers la science. Une chose essentielle que la science nous montre est que le libre-arbitre n’existe pas. Je crois que c’est ici que le bas commence à blesser : si le système que nous sommes ne dépend que de l’extérieur (par phénomène de causalité énoncé plus haut), quel contrôle a t-il sur lui-même ? Sans contrôle de lui-même, comment agir pour survivre ? D’où l’idée probable que la croyance en “Je” n’est pas fondée. Mais alors la motivation de base qui est la survie ? La survie de quoi ? La survie pourquoi ? (là je n’ai pas plus de réponse…) Tous nos décisions, comportements, actions, pensées, émotions ne sont que la résultantes de réactions physiques. La nature a généré des modélisateurs d’elle-même à travres les animaux. Des systèmes qui crééaient des objets neuroneux en miroir aux objets réels. Nous, homo sapiens créons aujourd’hui des modèles de la nature sur nos ordinateurs : des objets numériques en miroir aux objets neuronaux qui sont eux même en miroirs aux objets réels ! Ce qui est somme toute plutôt logique. jusqu’où la modélisation de l’univers ira t-elle ? Notre cerveau de quelques cm cubes ne contiendra jamais, oh non jamais le modèle complet de l’univers. Alors qu’est-ce qu’on fait ainsi condamnés à l’ignorance ?! L’univers pourra t-il un jour contenir en lui-même un modèle complet de lui-même ? Voilà pour la partie purement théorique mais effectivement notre conscience issue de nos cerveaux est un phénomène morphologique. La pensée est animale est n’ira je l’ai dit pas plus loin (sauf si l’hypothèse cyborg est plaisible : évolution mi-homme mi-machine). Pour en revenir donc à l’aspect morphologique et métabolique : notre pensée est limitée et surtout nous sommes tributaires de nos sentiments et de nos évolution : le Je existe chez tous les hommes, comme tous les hommes ont deux mains. C’est ainsi ! On ne peut pas y couper ! Pourquoi chercher à échapper à notre nature ? mais surtout : peut-on échapper à notre nature ? Simplement aissayons avec notre cortex préfrontal d’élaborer les thèses les plus réaliste sur notre nature (ce que nous faisons dans ce blog !) Mais sachons que sous cette analyses sont en embuscade les systèmes limbique, endocrinien, glanglionnaire, hormonal…
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Bonjour Benoît,
Merci pour ces belles réflexions. En théorie, je suis d’accord avec toi. Je veux dire lorsqu’on examine le monde et les rapports qu’on entretient avec lui en tant qu’objet d’étude, comme un modèle. On pose devant soi le sujet que l’on est et le monde qu’il se représente, autrement dit on s’en fait une représentation, qu’on analyse. A l’intérieur de cette représentation, l’analyse que tu as fait me semble tout-à-fait juste. Mais tu es resté par la force des choses dans une représentation, autrement dit dans une objectivation de toi comme sujet dans ses rapports au monde. Dès lors, le sujet qui a réfléchi sur cette représentation, lui, est resté en dehors d’elle. Bien sûr, tu l’y réintroduis aussitôt que tu réalises l’avoir oublié, en élargissant ta représentation, afin de l’y inclure lui aussi. Mais cette opération suppose déjà l’existence d’un nouveau sujet, en retrait de la nouvelle représentation, qui effectue l’inclusion. On se retrouve face à une régression sans fin, dans laquelle subsistera toujours un sujet qui échappera à la représentation censée le contenir.
On peut aborder le problème aussi d’un autre côté : supposons une réunion à huis-clos qui rassemble les plus éminents tenants des deux courants antagonistes : celui pour lequel, comme tu l’as très bien décrit, le “je”, le libre-arbitre et la vérité ne sont en fin de compte que des ajustements des organismes qui se considèrent dépositaires de ces qualités, parce que ces qualités ont l’avantage de favoriser leur survie, et que c’est à ce titre seulement, parce qu’elles sont efficaces, qu’elles sont vraies, et non pas par une quelconque vérité intrinsèque ou métaphysique qu’elle posséderaient ; et les tenants d’une philosophie du sujet, qui considèrent le sujet comme donné premier, précédant l’expérience, et capable de dégager au travers des multiples conceptions qu’il développe, une vérité qui ne soit pas un simple leurre, mais qui corresponde à quelque chose de vrai en absolu. L’existence de cet absolu, auquel ce sujet aurait de ce fait directement accès, conférerait du même coup a ce sujet une réalité immatérielle, parce qu’indépendante des phénomènes matériels qui soutiennent son existence. Imaginons que ces deux groupes de savants discutent ensemble des heures et des jours, affutant chacun leurs arguments les plus fins, jusqu’au moment où l’un des camps s’avoue vaincu. Imaginons que les tenants du sujet s’avouent vaincus, et que les tenants de la force aveugle triomphent. Ils sortiraient de la salle, et face aux journalistes, annonceraient la bonne nouvelle : “C’est nous qui avions raison. Il n’existe rien qui puisse être considéré comme vrai sans qu’on ne doive voir dans cette vérité autre chose que l’appât que nous tend la vie pour nous pousser à survivre.” Un journaliste pose alors cette question : “Mais alors, est-ce vraiment vrai, que vous ayez raison ?”
On s’aperçoit très bien, à l’aide de cette démonstration par l’absurde, que la validation d’un système ne peut jamais se faire à l’aide des seuls éléments du système. Et que le sujet, si les jugements qu’il émet concernant le système auquel il appartient prétendent dire quelque chose de lui qui ne soit pas simplement redondant par rapport aux éléments du système, doit se situer à l’extérieur de celui-ci. Or on a vu que c’est précisément ce qu’il fait : le sujet échappe obstinément à la représentation dans laquelle on cherche à l’enfermer. Comme le dit Wittgenstein, « Le sujet n’appartient pas au monde, mais il est une frontière du monde. » (tractatus 5.632)
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Bonjour.
Quand tu dis :
“poser devant soi le sujet que l’on est et le monde qu’il se représente = faire une représentation.”
“procéder à une objectivation de moi comme sujet dans ses rapports au monde = faire une représentation.”
Déjà ça me renforce dans l’idée que l’on ne fait que ça : faire des représentations !
Tu dis : “le sujet qui a réfléchi sur cette représentation, lui, est resté en dehors d’elle.”
Et pourquoi pas l’inverse ne serait-il pas vrai ? la représentation est dynamique, composée, calculatoire : elle peut être “la reflexion”. Même si on est d’accord que cette représentation d’elle-même n’est pas elle-même.
“Tu l’y réintroduis aussitôt que tu réalises l’avoir oublié, en élargissant ta représentation, afin de l’y inclure lui aussi. Mais cette opération suppose déjà l’existence d’un nouveau sujet, en retrait de la nouvelle représentation.ontenir.”
Ce que tu veux dire est que je ne parle plus du “je” mais du “il” : c’est ça ? Et que, du coup, il y a toujours un “je” ailleurs ? Pas forcément si on pars du principe que ce “je” n’existe pas. Et pourquoi le sujet serait-il forcément en dehors ? “je suis une représentation”, “je suis un symbole” ne suffit-il pas ?
Je ne comprends pas trés bien la théorie des tenants d’une philosophie du sujet, qui considèrent le sujet comme donné premier, précédant l’expérience, et capable de dégager au travers des multiples conceptions qu’il développe, une vérité qui ne soit pas un simple leurre, mais qui corresponde à quelque chose de vrai en absolu. Car on le sait bien, notre conscience SUIT notre évolution morphologique. Le corps précède la conscience. Penser qu’il existe un lieu fait de pure théorie spirituelle est inconcevable pour moi car il ne s’agit que du cerveau avec ses capacités et ses limites. (aprés il est vrai que la manipulation par ce cerveau des symboles mathématiques qui est une sorte de langage théorique de la nature matérielle me laisse pentois )
“L’existence de cet absolu, auquel ce sujet aurait de ce fait directement accès, conférerait du même coup a ce sujet une réalité immatérielle, parce qu’indépendante des phénomènes matériels qui soutiennent son existence.”
Tu veux parler, pour le dire autrement, du fait que deux choses coexistent : un univers qui se déroule comme un film, sans libre arbitre et où les hommes sont comme des machines (ou des zombies) et un univers de la perception ou de ce que tu appelles l’absolu ?
“Il n’existe rien qui puisse être considéré comme vrai”
Je ne dis ni ne pense exactement cela. par exemple l’absence de libre-arbitre est vraie pour moi.
La validation d’un système ne peut jamais se faire à l’aide des seuls éléments du système.
“Le sujet n’appartient pas au monde, mais il est une frontière du monde.”
100% d’accord. De toute façon, l’intérieur et l’extérieur… y’a pas vraiment de différence topologique entre les deux dans un univers fini ! “ça” se siturait donc bien à la limite…
Au plaisir de vous lire.
Benoit
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Bonjour Benoît,
Merci pour ta réponse. Tu dis : « par exemple l’absence de libre-arbitre est vraie pour moi. » Si tu défends la thèse que le “je” est illusoire, et que les seules réalités à l’oeuvre sont des forces matérielles qui n’ont en vue que la survie de l’organisme qui se nomme lui-même “je”, alors il faut bien reconnaître que la vérité du jugement que tu as formulée ne saurait être considérée comme une vérité au sens fort du terme, mais simplement comme l’expression appropriée d’un organisme qui émettrait des propositions qu’il qualifierait de vraies parce que cette capacité lui donnerait un avantage en terme de survie. Si “je” est illusoire, alors la pensée qu’il produit ne saurait conduire à une quelconque vérité, parce que c’est “je” qui juge de la véracité d’une proposition. Sans “je”, la pensée serait privée de la lumière qui lui permettrait de prétendre à la vérité. La vérité n’aurait dès lors aucun caractère absolu, mais constituerait une simple croyance bénéfique en terme de survie, au même titre que la croyance en Dieu, qui allongerait la durée de vie selon certaines études ( http://atheisme.free.fr/Revue_presse/Science_et_vie_1055.htm ). Croire que la vérité soit “vraie” serait ainsi illusoire, puisque sa véracité ne se mesurerait à rien d’autre qu’à sa capacité de favoriser la survie de l’organisme qui croirait (à tort) émettre des propositions vraies en absolu. On voit bien que soutenir une telle thèse fait tout s’écrouler, y compris la thèse en question, puisqu’elle ne s’appuie dès lors elle non plus sur rien qui soit positivement vrai. C’est ce paradoxe que j’avais voulu signaler dans mon précédent message avec l’exemple du débat contradictoire des scientifiques.
A partir du moment où on commence à penser, cette activité se crédite elle-même d’une capacité à trouver la vérité. La vérité apparaît comme une propriété de la pensée, et elle tire l’intégralité de sa légitimité de la pensée. Imaginer que la capacité à juger de la vérité puisse être infléchie par quelque chose qui se trouverait hors de la pensée, c’est retirer à la pensée toute capacité à trouver la vérité, et faire de la vérité un simple moyen utile. Si par exemple, en examinant la démonstration de la proposition “la sommes des angles d’un triangle fait 180 degrés”, je dois considérer que la vérité qui m’apparaît dans cette proposition n’est pas uniquement de nature abstraite, mais qu’elle dépendrait de processus matériels étrangers à la pensée elle-même, alors c’est la capacité de penser quelque chose de vrai en soi qui s’écroule, et avec elle la pensée elle-même. Et aussi toute la science qui prétendrait émettre des propositions vraies sur les processus matériels en question.
Si par contre, comme on est forcé d’en convenir, les jugements que je peux porter en m’en tenant à la seule pensée sont vrais, alors la question du libre-arbitre se pose sur un autre jour. Parce que je possède en moi quelque chose dont la réalité n’est pas dépendante d’un processus matériel.
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Cooool
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“la boucle étrange” ;D énorme
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Merci paul. 😉
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