Regards sur l'éveil
Café philosophique, littéraire et scientifique
|
Archives ·
Devenir membre ·
Log in · Contact
· Blog
|
Voir le sujet précédent :: Voir le sujet suivant |
Auteur |
Message |
didier
Inscrit le: 18 Fév 2018 Messages: 3260 Localisation: Région Parisienne
|
Posté le: Me 21 Août 2019 15:08 Sujet du message: Le Vide |
|
|
Bonjour à tous,
Ma démarche personnelle est souvent plus mystique que mentale et certains textes traitant du Vide me transportent littéralement au-delà de moi-même. Aussi il me paraît intéressant de vous en faire connaître certains, à travers leurs auteurs.
J’ai découvert dernièrement certains textes de Lilian Silburn, maintenant décédée, qui fut direct(eur)rice de recherche au CNRS, spécialiste du shivaïsme du Cachemire, du tantrisme et du bouddhisme et elle-même mystique.
Elle a notamment rédigé un texte général sur le Vide présenté en première partie du livre « Hermès – Expérience spirituelle en occident et en orient » qui en traite de façon profonde via les écrits de nombreux autres sages et que pour ma part je trouve très intéressant.
C’est ce texte que je me propose pour l’instant de recopier ici, par morceaux. N’hésitez pas à les commenter.
Le Vide, le Rien, l’Âbime de Lilian Silburn – Introduction
L’expérience spirituelle est bien plus une expérience de plénitude qu’une expérience de vide ; pourtant, l’une n’est pas possible sans l’autre, la vie mystique étant constituée par une alternance ininterrompue de vides et de pleins qui vont s’approfondissant de concert.
Avant d’entrer dans cette vie nouvelle, on ne peut imaginer ni se faire quelque idée, même approximative, du vide mystique, car on voit seulement des reflets de surface, jeux de lumières et d’ombres sur un écran qui n’offre qu’une illusion de profondeur ; mais dès que l’on aborde la vie réelle, l’écran s’évanouit, une troisième dimension se présente soudain, tout se creuse, s’approfondit, l’espace s’ouvre à l’infini, devient ce domaine immense dans lequel vacuité et plénitude prennent un sens parce qu’elles touchent à l’être substantiel.
Ainsi le vide donne relief et intensité aux êtres et aux choses qu’il enveloppe, il les situe à leur juste place et permet leur vivante interpénétration. Vide ou énergie vacuitante, pénétration et plénitude dépendent donc les uns des autres et engendrent une manière très nouvelle d’éprouver et de comprendre. Dès que les cavernes de l’entendement et de l’imagination sont vacantes, l’essence divine se révèle et le vide de son contenu ; trop subtile pour être appréhendée, elle produit l’impression d’une étrange vacuité ; reconnue ensuite, elle devient plénitude ; trop puissante, elle cause ivresse, extase et ravissement. Mais à leur tour, des états qui ont d’abord fulguré comme plénitude apparaissent comme vide une fois dépassés.
En fait le vide mystique est d’une richesse inépuisable. Les pages qui suivent ne peuvent en donner que quelques aperçus, illustrés par des impressions vécues de nos jours et par des expériences très vivantes de grands mystiques d’autrefois.
Mon but est de souligner l’importance du vide dans l’expérience spirituelle de tous les âges et de tous les pays sans prétendre aucunement à une étude de mystique comparée.
Il a paru nécessaire de consacrer une première partie à définir certaines modalités du vide, qui se retrouvent d’un bout à l’autre de la vie mystique, avant d’aborder les vacuités qui en caractérisent les diverses phases. |
|
Revenir en haut |
|
|
Ellebore
Inscrit le: 13 Juil 2019 Messages: 527 Localisation: La terre
|
Posté le: Me 21 Août 2019 17:36 Sujet du message: |
|
|
Bonjour Didier et bonjour à tous,
Merci pour ton partage.
Comme ton auteure cite Hermès dans son titre, et comme le sujet de ton post est le vide, en voici quelques occurrences, tirées de l'excellente traduction de l'Hermès Trismégiste, réalisée par Louis Ménard en 1866.
Livre I - §II - p22-26 - Discours universel d'Hermès à Asclèpios
ASCLÈPIOS :
Mais le mouvement doit être produit dans le vide, ô Trismégiste.
HERMÈS :
Ne dis pas cela, Asclèpios. Il n'y a pas de vide dans l'univers. Le non-être seul est vide et étranger à l'existence. Mais l'être ne pourrait pas être s'il n'était plein d'existence. Ce qui est ne peut jamais être vide.
ASCLÈPIOS :
N'y a-t-il donc pas des choses vides, ô Trismégiste, par exemple un vase vide, un tonneau vide, un puits vide, un coffre et autres choses semblables ?
HERMÈS :
Quelle erreur, Asclèpios ! Tu prends pour vides des choses toutes pleines et toutes remplies.
ASCLÈPIOS :
Que veux-tu dire, Trismégiste ?
HERMÈS :
L'air n'est-il pas un corps ?
ASCLÈPIOS :
Oui, c'est un corps.
HERMÈS :
Ce corps ne traverse-t-il pas toutes choses, et ne remplit-il pas ce qu'il traverse? Tout corps n'est-il pas composé de quatre éléments ? Tout ce que tu crois vide est donc plein d'air, et par conséquent des quatre éléments. Et en sens inverse, on peut dire que ce que tu crois plein est vide d'air, parce que la présence d'autres corps ne permet pas à l'air d'occuper la même place. Ainsi, les objets que tu appelles vides sont creux, et non pas vides, car ils existent et sont pleins d'air et de fluide.
ASCLÈPIOS :
Il n'y a rien à répondre à cela, ô Trismégiste; l'air est un corps, et ce corps pénètre tout, remplit tout ce qu'il pénètre. Mais que disons-nous du lieu où se meut l'univers?
HERMÈS :
Il est incorporel, ô Asclèpios.
ASCLÈPIOS :
Qu'est-ce donc que l'incorporel ?
HERMÈS :
L'intelligence et la raison s'embrassant elles-mêmes, libres de tout corps, exemptes d'erreur, impassibles et intangibles, restant fixes en elles-mêmes, contenant tout, conservant tous les êtres. Ses rayons sont le bien, la vérité, le principe de la lumière, le principe de l'âme.
ASCLÈPIOS :
Qu'est-ce donc que Dieu ?
HERMÈS :
Dieu n'est rien de tout cela, mais il est la cause de tout en général et de chaque être en particulier. Il n'a rien laissé au non-être; tout être vient de ce qui est, et non de ce qui n'est pas. Le néant ne peut devenir quelque chose; il est dans sa nature de ne pouvoir être. La nature de l'être, au contraire, est de ne pouvoir cesser d'être.
ASCLÈPIOS :
Comment donc définis-tu Dieu?
HERMÈS :
Dieu n'est pas l'intelligence, mais la cause de l'intelligence; il n'est pas l'esprit, mais la cause de l'esprit; il n'est pas la lumière, mais la cause de la lumière. Les deux noms sous lesquels il faut honorer Dieu ne conviennent qu'à lui seul, et à aucun autre. Aucun de ceux qu'on nomme Dieux, aucun des hommes ni des démons ne peut en aucune manière être appelé bon : ce titre ne convient qu'à Dieu seul ; il est le bien et n'est pas autre chose. Tous les autres êtres sont en dehors de la nature du bien; ils sont corps et âme, et il n'y a pas place en eux pour le bien. Le bien égale en grandeur l'existence de tous les êtres corporels et incorporels, sensibles et intelligibles. Tel est le bien, tel est Dieu. Ne dis donc pas d'un autre être qu'il est bon, c'est une impiété; ne dis pas de Dieu qu'il est autre chose que le bien, c'est encore une impiété. Tout le monde emploie le mot de bien, mais tout le monde n'en comprend pas le sens; aussi tout le monde ne conçoit pas Dieu, et par suite de cette ignorance, on appelle bons les Dieux et quelques uns des hommes, quoiqu'ils ne puissent ni être bons, ni le devenir. Tous les autres Dieux sont appelés immortels, et on leur donne le nom de Dieux comme une dignité. Mais pour Dieu le bien n'est pas une dignité, c'est sa nature. Dieu et le bien sont une seule et même chose et le principe de toutes les autres; car le propre de la bonté est de tout donner sans rien recevoir. Or, Dieu donne tout et ne reçoit rien. Dieu est donc le bien, et le bien est Dieu. Son autre nom est celui de Père, à cause de son rôle de créateur; car le propre du père est de créer. C'est pourquoi la plus haute fonction de la vie et la plus sacrée est la génération, et le plus grand malheur et la plus grande impiété est de quitter la vie humaine sans avoir d'enfant. Ceux qui manquent à ce devoir sont punis par les démons après la mort. Voici quelle est leur punition : leur âme est condamnée à entrer dans un corps qui n'est ni homme ni femme, condition maudite sous le soleil. Ainsi, ô Asclèpios, n'envie pas le sort de celui qui n'a pas d'enfant, mais plains son malheur en songeant à l'expiation qui l'attend. Tels sont, ô Asclèpios, les premiers éléments de la connaissance de la nature.
Livre II - §XII - p162-166 - Discours d'initiation
HERMÈS :
Quant au vide, auquel la plupart attachent tant d'importance, mon avis est qu'il n'existe pas, qu'il n'a jamais pu exister et qu'il n'existera jamais. Car tous les membres du monde sont parfaitement pleins, comme le monde lui-même est parfait et plein de corps différant de qualité et de forme, ayant leur apparence et leur grandeur : l'un plus grand, l'autre plus petit; l'un plus solide, l'autre plus ténu. Les plus grands et les plus forts se voient facilement; les plus petits et les plus ténus sont difficiles à apercevoir ou tout à fait invisibles. Nous ne connaissons leur existence que par le toucher ; aussi plusieurs les regardent-ils non comme des corps, mais comme des espaces vides, ce qui est impossible. Si on dit qu'il y a quel que chose hors du monde, ce que je ne crois pas, ce sera un espace rempli de choses intelligibles et analogues à sa divinité, de sorte que même le monde
qu'on appelle sensible soit rempli de corps et d'êtres en rapport avec sa nature et sa qualité. Nous n'en voyons pas toutes les faces ; les unes sont très grandes, les autres sont très-petites, ou nous semblent telles par l'effet de l'éloignement ou par l'imperfection de notre vue ; leur extrême ténuité peut même faire croire à plusieurs qu'elles n'existent pas. Je parle des démons, que je crois habiter avec nous, et des héros qui habitent au-dessus de nous, entre la terre et la partie la plus pure de l'air, où il n'y a ni nuages ni aucune trace d'agitation. On ne peut donc pas dire, ô Asclèpios, que rien soit vide, à moins qu'on ne dise de quoi telle ou telle chose est vide ; par exemple, vide de feu, d'eau, ou autre chose semblable. S'il arrive même que ceci ou cela, petit ou grand, soit vide d'objets de ce genre, rien ne peut être vide de souffle ou d'air. On en peut dire autant du lieu; ce mot seul ne peut se comprendre si on ne l'applique pas à quelque chose. En ôtant le terme principal, on mutile le sens; aussi dit-on avec raison : le lieu de l'eau, le lieu du feu ou autre chose semblable.
Comme il est impossible qu'il y ait quelque chose de vide, on ne peut comprendre un lieu seul. Si on suppose un lieu sans ce qu'il contient, ce doit être un lieu vide, ce qui selon moi n'existe pas dans le monde. Si rien n'est vide, on ne voit pas ce que serait le lieu en soi, si on n'y ajoute une longueur, une largeur, une profondeur, comme les corps humains ont des signes qui les distinguent.
Cela étant ainsi, ô Asclèpios, et vous qui êtes présents, sachez que le monde intelligible, c'est-à-dire Dieu, qui n'est perçu que par le regard de l'intelligence, est incorporel, et qu'il ne peut se mêler à sa nature rien de corporel, rien qui puisse être défini par la qualité, la quantité ou le nombre, car il n'y a rien de pareil en lui. Ce monde, qu'on nomme sensible, est le réceptacle de toutes les apparences sensibles, des qualités des corps, et tout cet ensemble ne peut exister sans Dieu. Car Dieu est tout, et tout vient de lui et dépend de sa volonté ; il renferme tout ce qui est bon, convenable, sage, inimitable, sensible pour lui seul, intelligible pour lui seul. Hors de lui rien n'a été, rien n'est, rien ne sera; car tout vient de lui, est en lui et par lui : les qualités multiples, les plus grandes quantités, les grandeurs qui dépassent toute mesure, les espèces de toutes formes. Si tu com prends ces choses, ô Asclèpios, tu rendras grâces à Dieu ; en observant l'ensemble, tu comprendras clairement que ce monde sensible et tout ce qu'il contient est enveloppé comme d'un vêtement par le monde supérieur. O Asclèpios, les êtres de tout genre, mortels, immortels, raisonnables, animés, inanimés, à quelque classe qu'ils appartiennent, offrent l'image de leur classe, et quoique chacun d'eux ait la forme générale de son genre, cependant tous ont entre eux des différences. Ainsi le genre humain est uniforme et on peut définir l'homme par son type; cependant les hommes, sous cette forme unique, sont dissemblables. Car l'espèce (le caractère individuel) qui vient de Dieu est incorporelle, comme tout ce qui est compris par l'intelligence. Puisque les deux éléments qui déterminent la forme sont les corps et les incorporels, ilest impossible qu'il naisse une forme entièrement semblable à une autre, à des distances de temps et de lieu différentes. Les formes changent autant de fois que l'heure a de moments dans le cercle mobile où est ce Dieu omniforme dont nous avons parlé. L'espèce (l'individualité) persiste en produisant autant d'images d'elle-même que la révolution du monde a d'instants. Le monde change dans sa révolution, mais l'espèce n'a ni période ni changements. Ainsi les formes de chaque genre sont permanentes et dissemblables dans le même type.
ASCLÉPIOS :
Le monde change-t-il aussi d'apparence, ô Trismégiste ?
HERMÈS :
On dirait que tu as dormi pendant cette explication. Qu'est-ce que le monde, de quoi se compose-t-il, sinon de tout ce qui naît? Tu veux donc parler du ciel, de la terre et des éléments, car les autres êtres changent fréquemment d'apparence? Le ciel, pluvieux ou sec, chaud ou froid, clair ou couvert de nuages, voilà autant de changements successifs d'aspect dans l'apparente uniformité du ciel. La terre change continuellement d'aspect, et lorsqu'elle fait naître ses fruits et lorsqu'elle les nourrit, lorsqu’elle porte des produits si divers de qualité, de quantité : ici du repos, là du mouvement, et toute cette variété d'arbres, de fleurs, de graines, de propriétés, d'odeurs, de saveurs, de formes. Le feu a aussi ses transformations multiples et divines, car le soleil et la lune ont toutes sortes d'aspects comparables à cette multitude d'images que reproduisent nos miroirs. Mais en voilà assez sur ce sujet.
Ellebore. _________________ Ellebore
Psychonaute
Par amour.
Dernière édition par Ellebore le Je 22 Août 2019 17:47; édité 2 fois |
|
Revenir en haut |
|
|
didier
Inscrit le: 18 Fév 2018 Messages: 3260 Localisation: Région Parisienne
|
Posté le: Me 21 Août 2019 18:47 Sujet du message: |
|
|
Bonjour Ellebore et merci pour ce partage.
J'ai extrait de ton texte les principales phrases d'Hermès concernant le vide :
Citation: | Il n'y a pas de vide dans l'univers. Le non-être seul est vide et étranger à l'existence. Mais l'être ne pourrait pas être s'il n'était plein d'existence. Ce qui est ne peut jamais être vide...
Quant au vide, auquel la plupart attachent tant d'importance, mon avis est qu'il n'existe pas, qu'il n'a jamais pu exister et qu'il n'existera jamais. |
Il est amusant de constater que cela est contradictoire avec la science actuelle qui considère quant à elle que notre univers est principalement rempli de vide (quoiqu'il semble que ce vide ne soit pas si vide que cela, mais il s'agit là du vide concerné par la physique et n'a que peu de rapport avec le vide dont veut traiter Lilian Silburn).
Le vide dont veut traiter Lilian Silburn est en effet le vide de la spiritualité, du mysticisme. Je ne sais pas si les phrases d'Hermès "Le non-être seul est vide" et "Quant au vide, auquel la plupart attachent tant d'importance" peuvent avoir le moindre lien avec ce vide "mystique", mais rien dans ce texte ne semble aller dans ce sens. |
|
Revenir en haut |
|
|
riseohms
Inscrit le: 30 Nov 2009 Messages: 4335 Localisation: paris
|
Posté le: Me 21 Août 2019 19:30 Sujet du message: Re: Le Vide |
|
|
didier a écrit: | Bonjour à tous,
Ma démarche personnelle est souvent plus mystique que mentale et certains textes traitant du Vide me transportent littéralement au-delà de moi-même. Aussi il me paraît intéressant de vous en faire connaître certains, à travers leurs auteurs.
J’ai découvert dernièrement certains textes de Lilian Silburn, maintenant décédée, qui fut direct(eur)rice de recherche au CNRS, spécialiste du shivaïsme du Cachemire, du tantrisme et du bouddhisme et elle-même mystique.
Elle a notamment rédigé un texte général sur le Vide présenté en première partie du livre « Hermès – Expérience spirituelle en occident et en orient » qui en traite de façon profonde via les écrits de nombreux autres sages et que pour ma part je trouve très intéressant.
C’est ce texte que je me propose pour l’instant de recopier ici, par morceaux. N’hésitez pas à les commenter.
Le Vide, le Rien, l’Âbime de Lilian Silburn – Introduction
L’expérience spirituelle est bien plus une expérience de plénitude qu’une expérience de vide ; pourtant, l’une n’est pas possible sans l’autre, la vie mystique étant constituée par une alternance ininterrompue de vides et de pleins qui vont s’approfondissant de concert.
Avant d’entrer dans cette vie nouvelle, on ne peut imaginer ni se faire quelque idée, même approximative, du vide mystique, car on voit seulement des reflets de surface, jeux de lumières et d’ombres sur un écran qui n’offre qu’une illusion de profondeur ; mais dès que l’on aborde la vie réelle, l’écran s’évanouit, une troisième dimension se présente soudain, tout se creuse, s’approfondit, l’espace s’ouvre à l’infini, devient ce domaine immense dans lequel vacuité et plénitude prennent un sens parce qu’elles touchent à l’être substantiel.
Ainsi le vide donne relief et intensité aux êtres et aux choses qu’il enveloppe, il les situe à leur juste place et permet leur vivante interpénétration. Vide ou énergie vacuitante, pénétration et plénitude dépendent donc les uns des autres et engendrent une manière très nouvelle d’éprouver et de comprendre. Dès que les cavernes de l’entendement et de l’imagination sont vacantes, l’essence divine se révèle et le vide de son contenu ; trop subtile pour être appréhendée, elle produit l’impression d’une étrange vacuité ; reconnue ensuite, elle devient plénitude ; trop puissante, elle cause ivresse, extase et ravissement. Mais à leur tour, des états qui ont d’abord fulguré comme plénitude apparaissent comme vide une fois dépassés.
En fait le vide mystique est d’une richesse inépuisable. Les pages qui suivent ne peuvent en donner que quelques aperçus, illustrés par des impressions vécues de nos jours et par des expériences très vivantes de grands mystiques d’autrefois.
Mon but est de souligner l’importance du vide dans l’expérience spirituelle de tous les âges et de tous les pays sans prétendre aucunement à une étude de mystique comparée.
Il a paru nécessaire de consacrer une première partie à définir certaines modalités du vide, qui se retrouvent d’un bout à l’autre de la vie mystique, avant d’aborder les vacuités qui en caractérisent les diverses phases. |
je me souviens de cette revue, un numéro spécial de la revue Hermes consacré au vide
je pense l'avoir encore chez moi, elle est parue au début des années 70
on y trouve, Outre Lilian Silburn, de nombreux auteurs, de Beeckett à Susuki en passant par Tauler, Heidegger, Alexandra David-Neel ou Cioran. Nous croisons dans ces pages Boehme Nicolas de Cuse, saint Jean de la Croix, Bouddha, Daumal, Milosz ou Hadewich d’Anvers ou les maîtres-architectes de l’Islam.
la revue est de nouveau disponible ici: http://www.editions-tredaniel.com/le-vide-hermes-n2-p-6636.html
<<Ainsi le vide donne relief et intensité aux êtres et aux choses qu’il enveloppe, il les situe à leur juste place et permet leur vivante <<interpénétration.
c'est très juste, le vide qui est conscience englobante donne du relief et de l'intensité à tout ce qui est perçu, les choses prennent de la consistance et une incroyable réalité
tout devient présent-présence, une présence qui est JE
Ellebore a écrit: | HERMÈS :
Ne dis pas cela, Asclèpios. Il n'y a pas de vide dans l'univers. Le non-être seul est vide et étranger à l'existence. Mais l'être ne pourrait pas être s'il n'était plein d'existence. Ce qui est ne peut jamais être vide. |
oui le vide n'a pas de réalité, c'est un vide plein
le vide n'a de sens que par rapport au mental , lorsque celui-ci se vide de lui-même et donc de tout son contenu qui n'est fait que de mémoire alors il se remplit immédiatement de ce qui est présent-présence, autrement dit l'être _________________ l’éveil c'est l'esprit qui, libre de tout objet ,reposant en soi et accueillant tout, se révèle à lui-même
Dernière édition par riseohms le Je 22 Août 2019 9:25; édité 2 fois |
|
Revenir en haut |
|
|
Ellebore
Inscrit le: 13 Juil 2019 Messages: 527 Localisation: La terre
|
Posté le: Me 21 Août 2019 19:40 Sujet du message: |
|
|
Didier, merci de ton avis,
Le vide tel que le décrit Hermès n'est pas le vide tel que le conçoivent les mystiques.
La différence tient du niveau interprétatif : Nous pouvons comprendre le vide par l'absence de quelque chose...
Par exemple lorsque nous ne pensons pas, pour nous notre tête est vide de pensées. Lorsque qu'une cruche est vide de vin, nous disons qu'elle est vide, néanmoins, elle n'est que vide de vin (ou d'eau, mais l'idée du vin me plaît bien) mais pleine d'air. Dans ce sens Hermès dit que (en gros) si notre tête est vide de pensées, elle reste pleine d'autre chose.
Dans l'univers même, le vide n'existe pas et ne peut exister. La lumière des étoiles elle-même capable de traverser des parsecs et des parsecs, rempli ce vide interstellaire que nous imaginons vide, faussement.
Aussi le vide ne peut exister dans l'univers, que par rapport à...
Aussi on peu dire la cruche est vide d'eau, et cette proposition est vraie.
On peu également dire ma tête est vide de pensées, et cela peut-être vrai; mais de quoi est-elle pleine alors ? Si la cruche est vide d'eau, elle reste pleine d'air...
Les sages disent aussi, à juste titre je pense, que la nature à horreur du vide; et quoi de plus fort que la nature sinon Dieu ? Et ne va t-Il pas dans le sens de la nature, ou des règles cosmique de la nature puisque c'est lui qui les a créées ?
Peut-être que quand notre tête est vide de pensées actives, elle est pleine de l'amour de Dieu ?
Aussi, et en accord avec Hermès nous pouvons dire que le vide n'existe pas, et cela aussi loin que notre pensée puisse nous porter, aussi loin que les confins de l'univers.
Ellebore. _________________ Ellebore
Psychonaute
Par amour. |
|
Revenir en haut |
|
|
Ellebore
Inscrit le: 13 Juil 2019 Messages: 527 Localisation: La terre
|
Posté le: Me 21 Août 2019 19:47 Sujet du message: |
|
|
Salut Riseohms,
Nos posts se sont croisés...
Content de te lire,
Citation: | oui le vide n'a pas de réalité, c'est un vide plein
le vide n'a de sens que par rapport au mental , lorsque celui-ci se vide de lui-même et donc de tout son contenu qui n'est fait que de mémoire alors il se remplit immédiatement de ce qui est présent-présence, autrement dit l'être |
C'est en gros ce que je voulais dire...
Le vide n'existe et ne peut exister...
L'idée du vide comme celle du non-être ne peuvent être que relatives, non absolues.
Par conséquent ce ne sont que des images de la réalité, et non la réalité... comme l'égo...
Et désolé Didier je n'avais pas compris qu'il s'agissait d'un article paru dans la revue 'Hermès'.
Cela n'est pas très grave cependant, le sujet n'a pas été quitté.
Ellebore. _________________ Ellebore
Psychonaute
Par amour. |
|
Revenir en haut |
|
|
Ellebore
Inscrit le: 13 Juil 2019 Messages: 527 Localisation: La terre
|
Posté le: Me 21 Août 2019 20:09 Sujet du message: |
|
|
Et comme le dit si bien Sadhguru, depuis notre naissance nous ne pouvons percevoir quoi que ce soit en dehors de nous, 'montrez moi où je suis et je vous prouverai, que je ne peux être qu'en vous...'
https://www.youtube.com/watch?v=beP3J7gUCEM
Ellebore. _________________ Ellebore
Psychonaute
Par amour. |
|
Revenir en haut |
|
|
joaquim Administrateur
Inscrit le: 06 Août 2004 Messages: 6058 Localisation: Suisse
|
Posté le: Me 21 Août 2019 20:39 Sujet du message: |
|
|
didier a écrit: | SILBURN :
L’expérience spirituelle est bien plus une expérience de plénitude qu’une expérience de vide ; pourtant, l’une n’est pas possible sans l’autre, la vie mystique étant constituée par une alternance ininterrompue de vides et de pleins qui vont s’approfondissant de concert. |
Je dirais même que l’expérience spirituelle est la découverte que le vide est plein. Que lorsque je me fais, moi-même, vide, c’est alors seulement que je suis plein — plein de tout ce qui n’est pas moi, autrement dit : de tout. Et c’est en même temps la découverte que ce plein, ce tout-ce-qui-n’est-pas-moi, c’est cela justement, moi.
Cela rejoint ce que dit Joël :
riseohms a écrit: | oui le vide n'a pas de réalité, c'est un vide plein
le vide n'a de sens que par rapport au mental , lorsque celui-ci se vide de lui-même et donc de tout son contenu qui n'est fait que de mémoire alors il se remplit immédiatement de ce qui est présent-présence, autrement dit l'être |
Ellebore a écrit: | HERMÈS :
Ne dis pas cela, Asclèpios. Il n'y a pas de vide dans l'univers. Le non-être seul est vide et étranger à l'existence. |
C’est ce que j’entendais en disant que l’ego, c’est le non-être. |
|
Revenir en haut |
|
|
didier
Inscrit le: 18 Fév 2018 Messages: 3260 Localisation: Région Parisienne
|
Posté le: Je 22 Août 2019 7:42 Sujet du message: |
|
|
joaquim a écrit: | Ellebore a écrit: | HERMÈS :
Ne dis pas cela, Asclèpios. Il n'y a pas de vide dans l'univers. Le non-être seul est vide et étranger à l'existence. |
C’est ce que j’entendais en disant que l’ego, c’est le non-être. |
Des propositions "l'ego c'est le non-être" et le "non-être est étranger à l'existence" on en déduit donc que l'ego n'existe pas réellement.
C'est ce que je pense mais je n'étais pas sûr que c'était aussi ton point de vue ; c'est bien ce que tu veux dire ? |
|
Revenir en haut |
|
|
didier
Inscrit le: 18 Fév 2018 Messages: 3260 Localisation: Région Parisienne
|
Posté le: Je 22 Août 2019 9:12 Sujet du message: |
|
|
L’article de Lilian Silburn « Le Vide, le Rien, l’Âbime de Lilian Silburn » est assez volumineux puisqu’il couvre une cinquantaine de pages du livre de la collection « Hermes » et constitue un panorama assez large de la question. Lilian Silburn est elle-même une mystique à propos de laquelle Jaqueline Chambron a écrit le livre : «Lilian Silburn, une vie mystique » dont voici la présentation de l’éditeur :
Citation: | Ce livre[Lilian Silburn, une vie mystique ] présente la vie et l'oeuvre de Lilian Silburn (1908- 1993), une des plus grandes indianistes françaises, spécialiste du shivaïsme du Cachemire, du tantrisme et du bouddhisme. Philosophe de formation, directeur de recherches au CNRS, Lilian Silburn s'est très tôt tournée vers les philosophies orientales. Elle fut une des premières à faire connaître en Occident les écrits des philosophes mystiques cachemiriens. Elle fut aussi disciple d'un grand maître soufi indien, Radha Mohan Lal Adhauliya, auprès de qui elle fera de nombreux et longs séjours jusqu'à sa mort en 1966. Composé d'un grand nombre d'écrits personnels jamais publiés à ce jour, le livre nous présente le témoignage d'une expérience spirituelle et philosophique exceptionnelle. Il évoque aussi l'atmosphère de la vie qu'elle mena au Vésinet après la mort de son maître, vie simple, active, adonnée à ses travaux scientifiques. Entourée d'amis qu'attiraient sa personnalité et son efficience, Lilian Silburn s'attachait à leur faire découvrir, au sein du silence et des formes les plus variées de la vie ordinaire, la voie qui lui avait été révélée par son maître. Illustré par des photographies, l'ouvrage comporte des témoignages variés qui complètent le regard porté sur cette personnalité hors du commun, à la fois grand savant et grande mystique. |
Suite de l’article de Lilian Silburn :
Le Vide, le Rien, l’Âbime de Lilian Silburn - Les Modalités du Vide
Concentration Mentale et Vide Mystique Spontané
Le terme ‘vide’ prête à équivoque. Il faut donc distinguer le vide mort et stérile de la concentration volontaire du vide spontané, vivant, qui apporte des énergies. Le premier – vide mental acquis par un effort intense et persévérant – vise à l’inhibition ou à l’arrêt de la pensée ; c’est un vide ponctiforme où la conscience se resserre et se rétrécit sur un point. Par contraste avec cette vacuité rigide, figée, fermée sur soi que caractérise la contraction, le second vide, mobile et fluide où la conscience se relâche, s’élargit, est « ouverture », car il n’a pas de limite. On peut encore préciser : si dans le vide-concentration le moi est actif et le vide immobile, dans le vide spontané au contraire, le moi est passif et le vide dynamique.
Je fabrique le premier, j’accueille et reçois le second.
Le vide mental dont les adeptes du hathayoga sont souvent victimes n’a rien du véritable samâdhi. Il ne conduit jamais à la plénitude ; en fait il ne mène à rien si ce n’est à faire échec au véritable vide.
Ruysbroeck dénonce ce « vide absolu » où demeurent sans connaissance et étrangers à toute vertu certains hommes qui se prennent pour des saints et s’adonnent au recueillement habituel au-dessus des images sensibles :
Citation: | … On rencontre d’autres hommes qui… au moyen d’une sorte de vide, de dépouillement intérieur ou d’affranchissement d’images, croient avoir découvert une manière d’être sans mode et s’y sont fixés sans l’amour de Dieu. Aussi pensent-ils être eux-mêmes Dieu… Ils sont élevés à un état de non-savoir et d’absence de modes auxquels ils s’attachent ; et il prennent cet être sans modes pour Dieu.[Œuvres de Ruysbroek l’admirable. Le livre des sept clôtures, ch. XIV] |
D’après un maitre tibétain :
Citation: | La cessation du processus de la pensée peut être pris à tort pour la quiescence de l’esprit infini qui est le but véritable.[Le Yoga Tibétain et les Doctrines secrètes.] |
Les Bouddhistes chinois eux aussi mettent en garde contre la « concentration » qui, s’accompagnant d’activité mentale et d’effort, vise à s’emparer de la vacuité :
Citation: | S’il en est qui, accroupis, figent leur esprit pour entrer en concentration, fixent leur esprit pour regarder la pureté… ramassent leur esprit pour avoir l’expérience intérieure, toutes ces pratiques font chez eux obstacle à la bodhi (éveil).[J.gernet, Entretiens du Maître de dhyanâ Chen-Houei du Ho-Tsö] |
Houei-neng disait aussi :
Citation: | Fixer son esprit et contempler la pureté, c’est une maladie et non pas du dhyanâ (recueillement plus élevé que le samâdhi, pour les bouddhistes). Quel progrès fait-on vers l’absolu en astreignant son corps à rester longtemps accroupi ?[J.gernet, Entretiens du Maître de dhyanâ Chen-Houei du Ho-Tsö] |
La même erreur se renouvelle d’ailleurs tout au long de la voie : après ceux qui figent leur esprit pour saisir la concentration, d’autres mettent leur esprit en mouvement, le contemplent et « saisissent la vacuité », à moins qu’ils ne s’identifient à elle. Certains, ayant passé par-delà erreur et éveil « sans pénétrer leur nature foncière, demeurent dans le non-être et se confient à la vacuité ».
Par contraste avec le vide passif issu de l’activité mentale, le Vide mystique ne résulté jamais d’un effort, on ne peut même pas le provoquer ; il s’établit soudain, sans qu’on le cherche, sans qu’on le désire. En conséquence les maîtres des disciplines les plus diverses, chrétiens, indiens, musulmans et autres font dépendre ce vide de la grâce, pur don gratuit et indéterminé. En agissant, la grâce commence par précipiter qui la reçoit dans le vide ou ce que l’on appréhende comme tel lorsque l’agitation a pris fin. En effet la grâce est infiniment délicate, elle pénètre de façon trop intime, trop silencieuse pour qu’on la décèle. Perçue ou conçue, elle n’aurait rien de suprême. Sens, mémoire, imagination, pensée, intuition ne peuvent l’appréhender ; mieux encore, dès que la grâce s’infuse dans les profondeurs du Soi, ces facultés se trouvent privées de leurs activités. N’éprouvant rien, on se croit vide :
Citation: | Si l’effort tendu vers une tâche, un devoir à accomplir est anéanti, l’ignorant imagine que lui aussi est réduit à rien. Il n’en est pas de même quant à la Réalité intériorisée, siège de l’omniscience : elle ne peut jamais être anéantie, puisqu’elle est la seule chose que l’on puisse percevoir.[Spandakârikâ,I] |
Plus tard les effets de la grâce, devenus sensibles, se manifestent clairement.
A l’inverse de la vacuité d’ordre mental où l’on s’efforce de lâcher prise en vue de faire le vide, ici c’est le vide qui permet de lâcher prise : les plongées dans le vide, semblables à des morts répétées, dégagent de l’emprise du moi et des choses tandis que les liens tombent d’eux-mêmes. Par la voie de l’indifférenciation, ce vide dynamique va anéantissant et consumant tout ce qui n’est pas l’essentiel ; il supprime la dualité moi et non-moi et livre accès à l’immensité et à la liberté.
S’il peut être qualifié de dynamique, c’est moins à cause de son pouvoir destructeur que de la vibration qui en forme le trait distinctif. Pas de vibration sans un vide préalable et pas de vide fécond sans vibrations. En effet, sitôt les mouvements grossiers disparus, la vibration se fait sentir.
Les mystiques vivantes - non les spéculations sclérosées - reconnaissent toutes l’importance de la vibration dans une expérience vécue, vibration signifiant toujours une certaine prise de conscience subtile qui permet de franchir les états de vacuité. Les çivaïtes du Cachemire la nomment spanda, sphurattâ et en font la pierre angulaire de leur système. C’est aussi le zikr du cœur et de l’intime des sufî, l'ébullition du pèlerin russe. Or, la vibration qui apparaît dès le début est très importante; plus on avance dans la vie mystique et plus cette importance s’affirme. C’est au sommet de la vie spirituelle que nous conduit saint Jean de la Croix lorsqu'il compare l'Esprit-Saint à un feu d'amour pénétrant d’abord l’âme pour la purifier; flamme destructive et douloureuse qui engendre le vide durant la Nuit spirituelle, elle prend ensuite l’aspect d’une "vive flamme d’amour" :
Citation: | Plus l’âme est purifiée dans sa substance et ses facultés... plus aussi la Substance divine l’absorbe d'une manière profonde, subtile et élevée dans sa divine flamme. Durant l’absorption de l'âme dans la Sagesse, l'Esprit-Saint met en mouvement les vibrations glorieuses de sa flamme. L’âme resplendit au-dedans des Splendeurs de Dieu. Les mouvements de cette flamme divine sont des vibrations, des jets de flamme que l’âme transformées en flammes n’est pas la seule à produire. Elle le fait conjointement à l’Esprit-Saint. |
Par cette vibration, le mystique échappe à l’écueil du vide stérile et passif, véritable piège pour qui manque d’ardeur et se refuse à sortir des limites de l’ego. Afin de rendre la conscience vibrante et, de ce fait, vigilante, certains maîtres sufi accumulent des vibrations dans le cœur de leur disciple en remplissant son souffle d’une énergie qui, selon leur expression « l’électrifie ». Le souffle vibrant se répand peu à peu dans le corps et, lorsque la personne est entièrement pénétrée par de vibrations, elle est mûre pour la surconscience de l’éveil du Soi.
Notons enfin une autre différence fondamentale entre ce vide et le simple vide mental : il s’accompagne de plénitude, soit que le plein est vide alternent, soit qu’ils coexistent, des vides de durée variable parsemant un fond ininterrompu de plénitude apaisée, ou inversement, un fond de vacuité se trouvant jalonné de moments de plénitude. |
|
Revenir en haut |
|
|
marie
Inscrit le: 25 Mai 2011 Messages: 2098 Localisation: Bruxelles
|
Posté le: Je 22 Août 2019 9:38 Sujet du message: |
|
|
"Tao est vide, et ses rayonnements et activités sont inépuisables.
Ô quelle profondeur est la sienne.
Il est le Père originel de toutes choses.
Il émousse son acuité, simplifie sa complexité, modère son éclat aveuglant et se fait semblable à la matière.
Ô quel calme est le sien. Il est de toute éternité.
J'ignore de qui il est l'Enfant. Il était avant le tout premier Dieu."
Tao Te King, chapitre 4
|
|
Revenir en haut |
|
|
joaquim Administrateur
Inscrit le: 06 Août 2004 Messages: 6058 Localisation: Suisse
|
Posté le: Je 22 Août 2019 10:15 Sujet du message: |
|
|
didier a écrit: | Des propositions "l'ego c'est le non-être" et le "non-être est étranger à l'existence" on en déduit donc que l'ego n'existe pas réellement.
C'est ce que je pense mais je n'étais pas sûr que c'était aussi ton point de vue ; c'est bien ce que tu veux dire ? |
Oui et non. Dire que l’ego n’existe pas réellement, c’est se placer du point de vue de l’être (donc de Dieu). Or, notre position particulière d’humains dans l’existence, c’est que nous sommes appelés vers Dieu, mais que nous ne sommes pas Dieu. Nous sommes du non-être (l’ego). Ce n’est que si nous acceptons pleinement notre insignifiance fondamentale, autrement dit si nous devenons réellement rien, vide, qu’alors nous nous ouvrons à notre vraie nature. Mais accepter pleinement de n’être rien, cela ne veut pas dire voir, en se plaçant à l’extérieur de soi, que l’ego serait non-être. Cela veut dire accomplir ce geste de néantisation intérieure. Se défaire de notre paresse qui nous fait prendre des mentalisations pour la réalité — comme celle que l’ego serait du non-être, par exemple : se dire que l’ego est du non-être, et donc qu’il suffit de le mettre hors-jeu, c’est demeurer dans une mentalisation ; devenir soi-même le non-être que désigne cette mentalisation, c’est sortir de la mentalisation, et accéder à l’être. Peut-on se représenter ce que c’est, pour du non-être : accéder à l’être ?
En faisant une recherche sur la « néantisation chez Maître Eckhart », je tombe sur cette thèse faite à Strasbourg par un doctorant japonais :
https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01493889/document
où je lis dans l’introduction :
« S’éveiller vraiment au néant, c’est, consécutivement à une «brèche», le connaître d’expérience et non pas simplement comme un objet ou un thème de la conscience, c’est aussi pour un homme ne pas s’enfermer dans l’auto-achèvement. » (p. 9)
C’est exactement cela.
« Percer son «ego», rentrer dans le fond de soi et expérimenter sa subjectivité en renaissant à soi implique une «pratique existentielle» du néant. » (p. 14) |
|
Revenir en haut |
|
|
riseohms
Inscrit le: 30 Nov 2009 Messages: 4335 Localisation: paris
|
Posté le: Je 22 Août 2019 10:16 Sujet du message: |
|
|
sur france culture:
Citation: | Libérez-vous des dangers de la pleine conscience : oubliez-vous pour pouvoir être de plain-pied dans le réel.
Vous voulez pénétrer la philosophie de Fichte, l’un des plus grands philosophes allemands ?
C’est tout simple : faites la méditation du verre d’eau.
Elle est toute simple. Prenez un verre d’eau. Buvez-le. Voilà !
Maintenant, si vous le faites en vous regardant le boire, en essayant d’être conscient de ce que vous êtes en train de faire, tout est perdu. Cela devient étouffant. C’est le principe de l’ongle incarné. En se retournant sur lui-même, l’ongle s’enfonce dans votre chair et vous blesse.
Vous connaissez l’histoire du mille-pattes et de l’escargot ?
L’escargot demande au mille-pattes comment il fait pour marcher vu le nombre si important de ses pieds.
Essayant de prendre conscience de ce qu’il fait, notre mille-pattes ne peut plus avancer.
3 minutes pour vous libérer à jamais du danger de la pleine conscience.
|
https://www.franceculture.fr/emissions/3-minutes-de-philosophie-pour-redevenir-humain/fichte-loubli-de-soi-est-le-critere-du-reel
c'est quand on s'oublie, quand on se vide de soi-même ,de tout notre connu ,que l'on se sent vraiment soi-même
mais ce soi est alors identique au réel., il implique l'ensemble du non moi .
le moi absolu de Fichte est union du moi et du non moi .
la conscience dénoncée dans cette émission de radio est ce que Franck terreaux appelle l'attention attentive , attentive à un objet , conscience objectivante
la conscience impliquée dans l'eveil est une attention non attentive
conscience pure sans objet
le soi n'est pas regardé, il est regard
cité par Joaquim Citation: | « Percer son «ego», rentrer dans le fond de soi et expérimenter sa subjectivité en renaissant à soi implique une «pratique existentielle» du néant. » |
_________________ l’éveil c'est l'esprit qui, libre de tout objet ,reposant en soi et accueillant tout, se révèle à lui-même
Dernière édition par riseohms le Je 22 Août 2019 10:21; édité 2 fois |
|
Revenir en haut |
|
|
didier
Inscrit le: 18 Fév 2018 Messages: 3260 Localisation: Région Parisienne
|
Posté le: Je 22 Août 2019 10:17 Sujet du message: |
|
|
marie a écrit: |
"Tao est vide, et ses rayonnements et activités sont inépuisables.
Ô quelle profondeur est la sienne.
Il est le Père originel de toutes choses.
Il émousse son acuité, simplifie sa complexité, modère son éclat aveuglant et se fait semblable à la matière.
Ô quel calme est le sien. Il est de toute éternité.
J'ignore de qui il est l'Enfant. Il était avant le tout premier Dieu."
Tao Te King, chapitre 4
|
Merci pour cette référence marie, dont voici une autre traduction (celle de Liou Kia-hway) :
Le Tao est comme un vase
que l'usage ne remplit jamais
Il est pareil à un gouffre,
origine de toutes choses du monde.
Il émousse tout tranchant [1],
Il dénoue tout écheveau [2],
Il fusionne toutes lumières [3],
Il unifie toutes poussières [4],
Il semble très profond,
il paraît durer toujours.
Fils d'un je ne sais qui
il doit être l'aïeul des dieux.
[1] Symbole de l'éminence
[2] Symbole du conflit
[3] Symbole des qualité
[4] Symbole des défauts
Dommage qu'on ne puisse demander à Lao-Tseu lui-même quel sens il voulait donner à ce texte . J'ai une voisine spécialiste du Taoïsme. A l'occasion, je lui demanderait quel est son point de vue.
On retrouve cependant ici cette notion, présente dans d'autres texte d'origines diverses, du Non-Être origine de l'Être. J'ai le sentiment que c'est de cela aussi qu'il s'agit ici.
Le mot Non-Être ne doit évidemment pas être pris ici à la lettre, mais dans le sens d'un Absolu qui dépasse toute possibilité de compréhension et qu'il est impossible à l'esprit d'appréhender, idée que l'on retrouve dans les premières lignes du Tao-Té King :
Le Tao qu'on tente de saisir n'est pas le Tao lui-même;
le nom qu'on veut lui donner n'est pas son nom adéquat.
Sans nom, il représente l'origine de l'univers;
avec un nom, il constitue la Mère de tous les êtres.
Par le non-être, saisissons son secret;
par l'être, abordons son accès.
Non-être et Être sortant d'un fond unique
ne se différencie que par leurs noms.
Ce fond unique s'appelle Obscurité.
Obscurcir cette obscurité
voilà la porte de toute merveille.
Les aspects "sans nom" et "avec nom" ressemblent étrangement à ceux du brahman sans attributs et du brahman avec attributs de l'hindouïsme. |
|
Revenir en haut |
|
|
didier
Inscrit le: 18 Fév 2018 Messages: 3260 Localisation: Région Parisienne
|
Posté le: Je 22 Août 2019 11:12 Sujet du message: |
|
|
joaquim a écrit: | didier a écrit: | Des propositions "l'ego c'est le non-être" et le "non-être est étranger à l'existence" on en déduit donc que l'ego n'existe pas réellement.
C'est ce que je pense mais je n'étais pas sûr que c'était aussi ton point de vue ; c'est bien ce que tu veux dire ? |
Oui et non. Dire que l’ego n’existe pas réellement, c’est se placer du point de vue de l’être (donc de Dieu). Or, notre position particulière d’humains dans l’existence, c’est que nous sommes appelés vers Dieu, mais que nous ne sommes pas Dieu. Nous sommes du non-être (l’ego). Ce n’est que si nous acceptons pleinement notre insignifiance fondamentale, autrement dit si nous devenons réellement rien, vide, qu’alors nous nous ouvrons à notre vraie nature. Mais accepter pleinement de n’être rien, cela ne veut pas dire voir, en se plaçant à l’extérieur de soi, que l’ego serait non-être. Cela veut dire accomplir ce geste de néantisation intérieure. Se défaire de notre paresse qui nous fait prendre des mentalisations pour la réalité — comme celle que l’ego serait du non-être, par exemple : se dire que l’ego est du non-être, et donc qu’il suffit de le mettre hors-jeu, c’est demeurer dans une mentalisation ; devenir soi-même le non-être que désigne cette mentalisation, c’est sortir de la mentalisation, et accéder à l’être. Peut-on se représenter ce que c’est, pour du non-être : accéder à l’être ? |
Tout à fait d'accord avec toi sauf pour ce qui concerne l'utilisation du mot ego. Tu sembles y mettre beaucoup plus que ce que j'y mets actuellement et probablement à tort, je veux bien le considérer.
Le fait de se prendre pour une personnalité, qui de plus est isolée du reste de l'univers, me paraît être une illusion. C'est tout cet aspect que je mets dans le mot "ego", le "je" isolé et limité au conditionnement de la nature, pris par habitude pour notre être, tout ce qui constitue, en fait, la mémoire psychologique dépeinte par Krishnamurti.
Derrière ce "je" figure évidemment un être et c'est probablement cet être que tu prends aussi en compte dans le mot ego mais alors je ne peux, pour ma part, qualifier cet être de non-être. Le problème me paraît provenir d'une insuffisance des concepts que nous utilisons ici pour décrire ces aspects.
Peut-être places-tu ce "je" au niveau de ce que certains appellent une "âme individuelle, dont le bouddhisme, par exemple ne conçoit pas l'existence, mais que l'hindouisme utilise avec profit.
L'âme individuelle me paraît être en fait le chainon manquant de ce découpage conceptuel. |
|
Revenir en haut |
|
|
|
|
Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets Vous pouvez répondre aux sujets Vous ne pouvez pas éditer vos messages Vous ne pouvez pas supprimer vos messages Vous ne pouvez pas voter dans les sondages
|
Powered by php B.B.
© 2001, 2005 php B.B. Group · Theme and Graphics
by Tim Blackman
Traduction par : php.B.B-fr.com
|
|