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Regards sur l'éveil Café philosophique, littéraire et scientifique
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waxou
Inscrit le: 13 Mars 2005 Messages: 361 Localisation: Marseille
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Posté le: Je 05 Mai 2005 19:40 Sujet du message: American Beauty |
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Je suis loin d'être un passioné de cinéma mais s'il y a bien un film qui a inspiré l'éveil en moi et que j'aurais voulu citer dans cette partie du forum c'est celui-ci dont l'auteur est Allan Ball.
Ce n'est pourtant pas un film adoptant une forme originale comme d'autres oeuvres du septième art se voulant plus profondes.
Pour situer l'histoire, il y a 7 protagonistes principaux: Une première famille, les Burnham avec l'acteur principal, Kevin Spacey, admirable dans ce rôle (j'ai adoré aussi le film K-pax) incarnant un père de famille effacé, amer, et résigné, ne comprenant pas comment sa vie est devenue si terne. Sa femme, Carolyn est l'incarnation même de l'égo et des intérêts de réussite sociale, oubliant par cet acharnement le moindre recul par rapport aux choses. C'est une caricature magnifique. Elle est totalement irritante, navrante, fatiguante. On n'imagine même pas pouvoir la raisonner tellement elle ne contrôle pas ses tensions mentales. Leur fille, Jane, une adolescente "blasée", sur la défensive mais passive, sans motivation apparente, assez détachée de son égo. Sa meilleure copine, Angela est une jeûne fille ambitieuse, qui n'existe que pour le regard des autres, s'inventant une fausse vie, et concentrant tout sur son pouvoir d'attirance physique. Leurs nouveaux voisins, les Fitts sont une famille avec un fils, Ricky, un père ex militaire à tendance nazie, et une mère souffrant de troubles psychiatriques que je ne saurai nommer, la rendant comme bloquée intérieurement dans le temps.
On pourra séparer en apparence deux formes d'éveil:
Celui du père, déclenché par un mélange d'événements: une passion déferlante pour Angela, l'amie de sa fille pourtant très jeûne, le raz-le-bol vis à vis de sa femme Carolyn, sa rencontre avec Ricky Fitts et son lacher prise vis à vis de la perte de son emploi pour des raisons de rentabilité. Le plus marquant sont ses commentaires en voix off, tout le long du film. Dont celui ci qui consitue un peu l'introduction de lui et sa famille:
"Je m'appelle Lester Burnham. Ca c'est mon quartier. Ca, c'est ma rue. Ca, c'est ma vie. J'ai 42 ans. Dans moins d'un an je serais mort. Bien sûr je ne le sais pas encore. En un sens je suis déjà mort. Regardez moi... entrain de me pallucher sous la douche. Ca c'est le meilleur moment de la journée. A partir de là c'est la déscente aux enfers. Ca c'est ma femme Carolyn . Vous remarquez comment le manche des cisailles s'accorde élégament avec ses sabots de jardinage? Ce n'est pas un hasard.(...) Mon dieu, rien que de la regarder m'épuise. Elle n'a pas toujours été comme ça. Avant elle était heureuse. Nous étions heureux. Ma fille, Jane, enfant unique. "Janie" est le stereotype parfait de l'adolescente: hargneuse, paumée, mal dans sa peau. J'aimerais lui dire que ça va s'arranger. Mais je ne voudrais pas lui mentir. Ma femme et ma fille me considèrent toutes les deux comme un lamentable perdant. Et elles ont raison. J'ai perdu quelquechose. Je ne sais pas exactement quoi, mais je sais que je n'ai pas toujours été aussi lethargique. Mais vous voulez que je vous dise? Il n'est jamais trop tard... pour se réveiller."
De nombreuses scènes transmettent un message très profond tout en étant très réalistes. La femme de Lester cumule toutes les erreurs égoiques possibles (ou presque), se donnant des claques lorsqu'elle pleure, pour un echec dont elle n'est pas vraiment responsable, puis pleurant encore plus se rendant compte du grotesque de la situation. Ecoutant des Cd de "développement personnel" qui ne font que l'enfoncer dans l'illusion et l'incohérence, puisqu'elle ne quitte jamais le cap de ses intérêts de réussite et de sa position aggressive vis à vis de tout, comme si elle se battait contre la vie chaque seconde.
L'éveil du père se fera par détachement vis à vis de tout ce qui l'inhibait. C'est étonnant comme c'est jouissif de le voir se transformer, et s'échapper sereinement de toutes les entraves qui essaient de le retenir. Son ego reste là, il gagne du charisme, s'accorde plus de plaisir et ne garde plus ses remarques pour lui. Il ne devient pas égocentrique pour autant, grâce à un sorte de curiosité, d'attrait pour la vie, il est à l'écoute, il devient attentif, et bienveillant automatiquement, avec pour seule aide, le lacher prise et légèreté.
L'éveil de Ricky est moins égoique. Il semble que ce dernier ait trop souffert et que son égo a quasiment déjà disparu. Il est presque uniquement une conscience-témoin. Il a une manie de filmer des choses qui paraissent inintéressantes. Comme un oiseau mort, un sac plastique qui tournoie au vent ou la fille de Lester, Jane, completement effacée à coté d'Angela.Il paraît assez apathique mais ses paroles sont d'une étonnante profondeur, par exemple ce dialogue avec Jane:
"Une fois j'ai vu une vieille femme qui est morte gelée dans la rue, une clocharde alongée sur le trottoir. Elle avait l'air tellement malheureuse... j'ai filmé cette vieille femme.
-Pourquoi tu l'as filmée?
-Parceque c'est fabuleux.
-Pourquoi est-ce si fabuleux?
-Quand tu vois un truc pareil, c'est comme si Dieu rentrait en connection avec toi, l'espace d'un instant. Et si tu es assez receptif, tu ouvres les yeux.
-Et qu'est-ce que tu vois?
-La beauté."
Ou cette description qui se passera de commentaire, concernant la plus belle chose qu'il ait filmée: un sac plastique
"C'était une de ces journées grises ou il va se mettre a neiger d'une minute à l'autre et qu'il y a comme de l'electricité dans l'air. On peut presque l'entendre. Et ce sac était là. Entrain de danser avec moi. Comme un enfant qui m'invitait à jouer avec lui. Pendant 15 minutes. C'est là que j'ai compris qu'il y avait autre chose. Au delà de l'univers. Plus loin que la vie. Je sentais cette force, incroyableemnt bienveillante qui disait qu'il n'y avait aucune raison d'avoir peur. Jamais.
Sorties du contexte, les images n'ont aucun sens je sais mais...ça m'aide à m'en souvenir. J'ai besoin de m'en souvenir. Parfois je me dis qu'il y a tellement de beauté... dans le monde... que c'en est insoutenable. Et mon coeur est sur le point de s'abandonner..."
Je ne peux en dire plus, même si j'aurais été tenté de mettre d'autres citations toutes aussi intéressantes. Seulement il y a une grande place pour l'effet de surprise et l'humour, la légèreté. Il y a une sorte d'intégrité à ce film que je ne peux qu'éffriter avec mes commentaires, seulement je ne voulais pas en faire une simple publicité puisqu'il traite implicitement de beaucoup de sujet de ce forum.
D'autant plus qu'il bénéficie d' une fin grandiose, un peu comme un bouquet final. Les musiques donnent une dimension spéciale, elles sont merveilleusement choisies et jouent aussi un rôle important. C'est un film qui pourra être vu différemment une seconde fois, car il est rempli de détails subtils tous cohérents. Or il est dûr d'être à l'écoute de chacun d'eux la première fois. Les sujets traités sont nombreux: l'amour, le sexe, le désir, la société, la recherche de soi, la réussite, l'homosexualité, le lacher prise, le rejet, la souffrance, l'intolérance, la beauté, la dualité et bien sûr l'éveil...
Cette oeuvre réussit à critiquer de nombreuses choses et de nombreux comportements, tout en inspirant la compréhension. La démesure de l'inconscience de Carolyn calme facilement cette partie de nous qui voudrait mépriser de tels comportements. Seulement c'est une caricature dont le grotesque n'est pas si loin de la réalité parfois.
Bref, une vraie friandise spirituelle. |
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feuille
Inscrit le: 09 Mai 2005 Messages: 353 Localisation: Paris
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Posté le: Lu 25 Juil 2005 11:45 Sujet du message: |
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J'ai récemment pu voir ce film, motivé par le début de votre message à ce sujet (en attendant de voir le film pour lire la suite de votre message!).
Vous rapportez très justement ce qui est exprimé dans le film et je le conseille vivement à tous ceux qui ne l'ont pas encore vu! |
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teardrop
Inscrit le: 27 Avr 2006 Messages: 21
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Posté le: Je 27 Avr 2006 13:49 Sujet du message: |
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Ce film est une perle. Un film comme on en voit peu.
Je l'ai adoré, vraiment, vu et revu, je ne m'en lasse pas ; chaque fois un nouveau détail m'apparait.
Musiques époustouflantes.
Waxou, comme tu le dis si bien, c'est jouissif de voir Lester s'épanouir, changer, "profiter de la vie", comme on dit. Il se détache peu à peu de ses habitudes et devient ce qu'il a toujours souhaité.
C'est un film vraiment marquant ; au début, les personnages paraissent tous normaux, voire banals, et au fur et à mesure on se rendra compte que la plupart sont névrosés... Satire de la société américaine, ce film est également une magnifique leçon de vie. Je l'ai trouvé superbe...
Quelques extraits qui m'ont marquée (je ne vais pas remettre les tiennes, Waxou, qui sont top aussi )
"Bien sûr, je pourrais être aigri de ce qui m'est arrivé, mais c'est inutile... il y a tant de beauté dans le monde. Parfois, j'ai l'impression qu'elle me submerge de toutes parts en même temps, et c'en est trop, mon coeur se remplit comme un ballon prêt à exploser... et là, je comprends qu'il faut que je lâche prise, que j'arrête d'essayer sans cesse de m'y raccrocher. Et ça glisse sur moi comme de la pluie. Et je ne peux plus rien éprouver d'autre... que de la gratitude, pour chaque instant... de mon insignifiante petite vie.
Vous ne comprenez pas ce que je suis en train de vous dire n'est-ce pas ? Ne vous en fait pas, un jour... vous comprendrez !"
Lester Burnham
Angela -Qu'est-ce que tu fais ?!
Ricky -Je filme cet oiseau mort.
Angela -Pourquoi ?!
Ricky -Parce que c'est beau. _________________ Un trésor de belles maximes est préférable à un amas de richesses. (Socrate) |
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