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Regards sur l'éveil Café philosophique, littéraire et scientifique
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Plume
Inscrit le: 30 Oct 2005 Messages: 105 Localisation: Région Parisienne
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Posté le: Ma 01 Nov 2005 12:27 Sujet du message: Paradoxe de l'amour: la caresse comme recherche sans fin. |
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Qu'est ce que la caresse en amour? Sensibilité, certes, toutefois notons qu'elle est volonté de transcender le sensible: si elle ne sent pas au delà du "senti", elle est une recherche qui vise à le dépasser, sans jamais y parvenir.
Elle est comme le contact, mais tend à une finalité autre. Cette finalité, c'est elle-même! "La caresse se nourrit de sa propre faim (E. Levinas), cherche "quelque chose qui s'échappe sans cesse vers un avenir". Rien ne la satisfait. Insasiable, elle fouille, et ce qu'elle vise est un "ne-pas-être-encore", qui pourtant ne devient jamais de "l'être-pour-moi"... Etrange, n'est-ce pas?
Le désir renaît sans cesse, précisemment parceque son essence consiste à viser ce qui ne s'atteind pas. L'Eros nous ramène sans arrêt à la "virginité à jamais inviolée du féminin" (qui n'a aucun rapport avec la femme: sorte de présence-absence, tangible et pourtant fuyante, mystère éternel). Il ne s'agit pas, comme chez Sartre, de saisir, "d'avoir", mais au contraire de ne se saisir de rien. L'objet de la caresse n'est pas physique, ni possible, ni à-venir; c'est la pure altérité (pas Sartrienne, pas celle que je veux interioriser, ramener à moi-même, consommer), ce qui ne peut pas être là quand tout est là.
Le désir nous ouvre à la transcendance de l'autre en tant qu'autrui, à son irréductibilité à ma subjectivité. Intentionnalité signifie chez Husserl "tendre-vers", c'est ce qu'illustre parfaitement il me semble cette pensée: la caresse est l'image d'une conscience désirante dont l'objet est perpétuelle fuite. |
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Plume
Inscrit le: 30 Oct 2005 Messages: 105 Localisation: Région Parisienne
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Posté le: Ma 01 Nov 2005 14:45 Sujet du message: |
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Sans doute, Luz-azul, sans doute; mais voyez-vous je suis nouveau ici, et pour moi, "l'éveil" ne sonne encore que comme un mot creux. Je me renseigne, je vous lis (en particulier cet essai grandiose de Joaquim), et je suis bien conscient que le moi devrait s'adosser à mes reflexions pour les incarner, leur insuffler un peu plus de réalité...
Excusez s'il vous plait ces remarques intempestives. Voulez-vous que j'ajoute à ce texte sur la caresse l'idée que moi-même, dans mes rapports amoureux, n'ai jamais réussi à rassasier cette faim étrange qui m'anime le corps? Car c'est bien de vécu qu'il s'agit, pas seulement d'une démonstration douteuse ni d'une parade intellectuelle. En fait, j'ai cherché ici à faire toucher à tous cette réalité de l'accomplissement impossible en amour, y compris (ce que je n'ai pas dit) dans l'acte sexuel, qui n'offre qu'une courte satisfaction, et qui ne fatigue pas réellement le désir. Où j'en suis, moi, quel est mon vécu? J'ai dans mon rapport à l'autre un vertige ineffable, vertige qui me fait prendre conscience en chaque instant de la présence d'un moi-même qui n'est pas moi, qui fait respirer, aussi, ce monde dans lequel je m'incrit et dont je partage la qualité première d'être, et qui me donne l'impression de peser le vide et la totalité à la fois.
C'est une question de mots, elle est donc provisoire: peut-être que l'éveil, cette eternelle nouveauté, cette faculté de renaissance sans doute (dites-moi, s'il vous plait, où je me trompe), cet éclatement du moi vers le donné du monde, ne m'est pas si étranger que cela. A vrai dire je n'en sais rien, mes études en philosophies (mon programme, pour toute l'année, est une grosse introduction à l'idéalisme transcendantal de Kant, et il est très profitable, donc, pour moi, de coller le plus fidèlement à sa pensée, pour qu'à la fin je puisse dire: "je l'ai compris") déteignent probablement sur mes discours, et j'aimerais y remédier. Sachez pour information que mes vacances s'achèvent aujourd'hui, et que je ne pourrai vous répondre que très rarement (plus de PC)... Pour moi, l'intégration de ce site est une sorte d'initiation, d'ouverture à un univers qui m'a toujours été proscrit, justement, par le moi que mon éducation a engendré. Tout ceci, je l'avoue, me donne l'impression d'une découverte sans commune mesure avec toutes les découvertes possibles, raison pour laquelle il me faudra un certain temps d'adaptation.
Partageons donc nos vécus, même si pour moi (paradoxe du pour-moi qui ressurgit partout) c'est encore trouble comme méthode. Apprenez-moi, je n'attend que cela! Essayez de ne pas me ranger trop vite dans le tiroir des exhubérants prétencieux... |
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Talomi
Inscrit le: 16 Août 2005 Messages: 102 Localisation: Région Montréalaise/ Québec
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Posté le: Ma 01 Nov 2005 16:10 Sujet du message: |
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Plume a écrit: | ...mes études en philosophies (mon programme, pour toute l'année, est une grosse introduction à l'idéalisme transcendantal de Kant, et il est très profitable, donc, pour moi, de coller le plus fidèlement à sa pensée, pour qu'à la fin je puisse dire: "je l'ai compris") déteignent probablement sur mes discours, et j'aimerais y remédier. |
Je pourrais te suggérer d'écrire une thèse de ta propre philosophie basée sur tes ressentis. C'est un travail très exigent mais qui éclaire bien des mystères. Malheureusement on n'enseigne pas l'écoute dans le silence , ce qui te ferais comprendre énormément plus que de coller à la peau d'un autre. C'est l'ultime sensualité, l'ultime caresse car le ressenti est "coller à toi-même" . Si tu réussissais à faire ça, tu serais un grand philosophe naturel sans besoin de diplôme. Cette suggestion de l'écoute dans le silence vaut autant pour moi que pour tous, c'est la pointe de l'aiguille à trouver dans son univers propre. On appelle ça aussi l'attention. |
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joaquim Administrateur
Inscrit le: 06 Août 2004 Messages: 1421 Localisation: Suisse
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Posté le: Ma 01 Nov 2005 16:17 Sujet du message: |
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Plume a écrit: | Il ne s'agit pas, comme chez Sartre, de saisir, "d'avoir", mais au contraire de ne se saisir de rien. L'objet de la caresse n'est pas physique, ni possible, ni à-venir; c'est la pure altérité (pas Sartrienne, pas celle que je veux interioriser, ramener à moi-même, consommer), ce qui ne peut pas être là quand tout est là.
Le désir nous ouvre à la transcendance de l'autre en tant qu'autrui, à son irréductibilité à ma subjectivité. Intentionnalité signifie chez Husserl "tendre-vers", c'est ce qu'illustre parfaitement il me semble cette pensée: la caresse est l'image d'une conscience désirante dont l'objet est perpétuelle fuite. |
Voilà qui entre en parfaite résonnance avec ces phrases que j'avais écrites il y a deux jours:
joaquim a écrit: | L’amour, c’est ce qui est au-delà du désir. Non pas en-deçà, ni à côté, mais dans son prolongement. Il faut passer à travers le désir, sans s’y arrêter, sans perdre son élan dans la satisfaction, mais demeurer dans l’ouverture. Dans un mouvement immobile, qui épouse le fondement du monde. |
Je suis toujours émerveillé par ces accointances qui nous font construire, à travers nos propres expressions maladroites de l'irreprésentable, un autre texte, un texte “relationnel”, dont nous sommes les phrases, et qui est lui aussi irreprésentable, mais qui nous permet pourtant d'entrer dans un autre rapport avec l'irreprésentable que ne le fait le texte écrit, car il n'en dessine pas seulement la frontière: il nous plonge littéralement dans une communion d'esprit et nous donne à toucher “réellement” cet irreprésentable, cette altérité de l’autre, cette porte que celui-ci nous ouvre vers notre propre source. |
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