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...Comment parler de l'éveil ?

 
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virgilewest



Inscrit le: 27 Sep 2006
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MessagePosté le: Di 23 Déc 2007 18:17    Sujet du message: ...Comment parler de l'éveil ? Répondre en citant

La question est : Comment parler de l’éveil ?

Je me marre intérieurement, et me dis que c’est peut-être ce qui est chaque jour en débat ici, quelque part.

D’où je suis, je vois deux choses, deux mondes. L’avant, et l’Après. Avant le par-delà du cœur, et Après le par-delà du cœur. L’un est ancré dans l’Ego, l’autre n’y est plus attaché, lié.

Pour illustrer mon propos, je vais prendre un exemple tiré du bouddhisme, mais aussi du christianisme.

Ce qui me paraît évident aujourd’hui, est que dans beaucoup de religions, si ce n’est toutes, lorsqu’on donne une règle d’action, on ne donne pas sa portée. On se retrouve ainsi empaquetés dans des « il faut », des « tu dois », et autres murs rigides à la conscience.
Exemple : les innombrables règles du bodhisattva. Un bodhisattva ne boit pas, ne fume pas, ne fait pas l’amour, ne ceci, ne cela. Mais toute la différence est dans le bodhisattva réalisé, et celui qui ne l’est pas encore. Car il est possible de « faire vœux de bodhisattva » : on suivra alors à la lettre environ cent règles intangibles, au risque de casser ce vœux.
Cent règles, ça fait beaucoup. Pourquoi n’est-il pas dit, ou écrit quelque part, ou alors je ne l’ai pas lu et je me réjouirais que cela soit ainsi, que le bodhisattva ne boit pas, au sens où il n’a même pas l’idée de boire ; il ne fume pas, car il n’en a même pas le désir ; il ne danse pas car il n’en ressent pas le besoin… Et celui qui a fait vœux de bodhisattva, lui, qui aura envie de prendre femme, de danser peut-être, que lui restera-t-il en conscience ? …Une frustration ? Un arrêt ? Un mur ? Je suppose que l’aspirant apprend de lui-même à ne pas se frustrer, il ne pourrait survivre sinon. Après, une restriction à mon propos : la vie de la communqauté de bouddha est un acte collectif, et je suppose/espère que les règles s’accompagnent d’une compréhension communiquée de leur aboutissement.
Pour la chrétienté, un exemple caustique m’avait fait rire, et c’est un peu l’idée qui se dégage des règles du bodhisattva : l’Eglise se devant de régler tous les moments de la vie des fidèles pour leur accession au Paradis, elle a dû, à une époque (ne me demandez plus laquelle, à peu près vers le XVIIe siècle je pense), statufier sur la relation annale au sein du couple, interdite il va de soi. Mais le débat ne se portait pas tant sur la question elle-même que sur une autre : les curés devaient-ils ou non dire aux fidèles que cela était interdit, au risque de donner de mauvaises idées aux filles innocentes ? La question ne fut jamais tranchée, et la décision fut de laisser chaque curé faire comme il l’entendait, selon ses ouailles, s’il le dirait à une large assemblée ou en particulier, etc.

Ceci m’amène à deux choses, deux questions :
. L’idée de l’interdit ne crée-t-elle pas le désir de transgresser cet interdit ? Et dans ce cas, ne vaut-il pas mieux ne rien prescrire plutôt que de prescrire un interdit ?
Une question me vient de cette dernière question : l’idée que l’idée de l’interdit crée le désir de le transgresser, n’est-elle pas tout simplement une idée moderne, une idée de moderne (comme quoi, je me méfie de moi-même…), due aux multiples agressions dont nous sommes victimes dans notre société (si ! tu désires acheter cela ! ce lecteur mp3 est tout ce dont tu rêves, si tu l’as tu seras heureux ! Voyages, il n’y a de meilleur expérience au monde ! Baise à tire larigot ! … ) ? Et dans ce cas, pour deux mille cinq cent ans, la règle du bodhisattva eut raison d’être ce qu’elle est. Mon avis est partagé et je ne parviens pas à trancher.

Je dis ça, car tous les « il faut » que j’ai donné à ma conscience en pâture ont été plus contraignants que les propres règles que je me suis fixé (je progresse…).
Par exemple, il m’a fallu un moment m’éloigner de Zarathoustra et Nietzsche en général, pour mieux y revenir, j’entends plus sereinement et avec distance (d’ailleurs, le fait d’avoir pu apprendre à méditer par moi-même me fut salvateur face à ces murs de concepts si beaux et scintillants aux effets pervers. cf. "se construire des conditions pour l’éveil" : http://www.cafe-eveil.org/forum/ftopic920.html). En plus, dans le mot d’un interdit, on peut un peu mettre ce qu’on veut… Voilà pour ce point.

. Deuxième question : Une fois j’ai lu, je ne sais plus où (on lit trop…), une métaphore que j’ai trouvé très belle. C’était peut-être ici d’ailleurs, dans un post de petitmoyengrand. Il s’agissait de l’idée de se fixer une règle ; des règles. Je ne sais plus qui, disait que se fixer des règles (mais dans l’optique présente je préfère une règle, même si elle régit plusieurs actions), donc que se fixer une règle, permettait de « raboter l’Ego », et par la force du temps et des privations soutenues, s’il y a privation idée de privation, d’effacer les désirs comme s’ils n’avaient jamais existés. Et, cet Ego raboté, du coup un esprit beaucoup plus calme, qui ne se perd pas dans les déferlantes de ses désirs et de ses pulsions, était mieux à même d’accueillir en lui la grandeur de l’éveil, il y était préparé.

En ce sens, est-ce comme cela qu’il faudrait voire la règle du bodhisattva ? Je le crois, même si le paragraphe qui précède me dit « attention aux “il faut“ ».
Cela me fait penser à ce que m’avait dit une prof de philo lors d’un oral sur … : au XVIIe siècle, si l’austérité était la règle pour accéder à Dieu, c’est qu’une vie sous le signe des règles, donc raboter l’Ego je suppose, permettrait de mieux accueillir la grâce divine le jour où elle viendrait, de mieux l’accueillir.



J’en reviens donc à ma question de départ : comment parler de l’éveil ? Ou plutôt : comment parler de façon à établir une distinction entre l’avant et l’Après, que j’évoquais précédemment.

Les éveillés ci-présents me diront peut-être que cela n’est surtout pas à faire, ce que je pourrais comprendre (peut-être car « ce qui est un est un », par exemple), et que cette volonté ne procède que de ma propre dualité.
Mais pour une raison raisonnante, et je me dis que mon expérience m’a amené pas mal de chose pour comprendre à la fois ce qu’il y a derrière l’Ego (le par-delà), et ce qu’il y a dedans, ça n’est peut-être pas aider cette raison seule, que soit de ne rien dire, soit de dire qu’il n’y a que l’un, et cherches où tu peux.

J’en reviens encore à mon expérience (j’arrive de moins en moins à me défaire de celle-ci dans mes propos pour les soutenir, ce qui est, je crois, un signe de santé !). Je me dis souvent : si tu avais vécu pleinement ta révélation première, si tu étais resté par-delà… Comment aurais-tu expliqué alors comment aller vers ce même état, puisqu’il t’es venu ? Me direz-vous, cela aurait alors peut-être été le « génie du cœur » qui aurait parlé (cf. Nietzsche et l’éveil - http://www.cafe-eveil.org/forum/viewtopic.php?p=12347#12347), en cela plus riche de mille lieues que ce que je pourrais jamais dire. Je n’en sais rien, et la question n’est pas là. A la limite, si : génie du cœur pour les personnes que j’aurai rencontré peut-être, mais pour ce qui est transmis par l’écrit ? Car la lecture de tous les maîtres ne nous enseigne rien que nous n’ayons déjà vécu, ou pour être plus clair : lire un maître ne nous amène qu’à la limite des expériences que nous avons vécu, et qui vont dans le sens de ce qu’il dit. Mais derrière cela, nous sommes aveugles, comme je le suis pour une partie de Zarathoustra.

Nietzsche, dans Ecce homo, parle très bien de son vécu, relatant ses états aux moments où il a écrit chacun de ses livres. Et un tel document est une mine d’or pour qui ne cherche pas seulement l’argutie conceptuel, mais bien à conduire sa propre vie.

Ce que je voudrais établir, quelque part, c’est une formulation de soi dont la ligne de fuite soit l’éveil. Tracer des lignes de vies comme autant d’existences vécues, d’expériences vécues, et tenter peut-être, à terme, de s’accorder sur un vocabulaire commun.
Cela vous paraît-il déraisonné ? Hors de toute réalité ? Idiot ?

Limite : Je n’aime pas les systèmes, et ne veux pas non plus en fonder un. Peut-être me répondrez-vous que ce que je cherche à faire se fait tous les jours sur le café-éveil, où je n’ai pas assez le temps pour aller (désolé, mais entre une licence de philosophie à distance et des cours d’acupuncture, je ne devrais même pas écrire là ce que j’écris…).

Pour moi, quelque part, le vocabulaire permettant de décrire tous les états que j’ai traversé est trop pauvre. En faut-il un ? Ne serait-ce pas là ré-enfermer du vécu, de la mémoire corporelle, dans un concept mental et figé ? Quelque part j’ai envie de dire oui à ce vocabulaire, communiquer reste tout de même fantastique, et d’une autre manière, je me dis que non, que la verbalisation doit garder ses limites.
Mais l’idée est bien là : ce serait une expression destinée à communiquer, et non destinée à être lue, même si elle passerait d’abord par la lecture. L’idée étant qu’un langage plus proche de la sensation/emotion/transport permettrait dans l’échange verbale de mieux appeler à soi la racine de son vécu, et ainsi échanger plus réellement le vécu. Un échange du coup plus profond.

Ainsi, tenter de refaire corps avec nos pensées, en essayant notamment d’identifier leur chronologie : telle pensée, telle sensation en moi, est née de telle expérience. C’est à telle moment que je me suis cela, et cela a changé mon rapport au monde de telle manière.
Aussi peut-être, de penser la pensée comme une expérience elle-même. C’est-à-dire : la force d’une idée se contient dans des mots, mais dans des mots il peut aussi bien n’y avoir rien du tout, aucun ressenti. Si nous nous vivons par les pensées, penser aussi que les pensée sont un mouvement du corps, une part de déploiement de la vie en nous.

Ce type de descriptions, de vocabulaire, permettrait peut-être une moindre étanchéité de l’Ego d’avec l’éveil… Croyance ?
Ou comment apprendre à se construire intérieurement.

Bref, voilà de beaux projets pour l’avenir, mais certaines questions valent d’être partagées, et c’est à vous que je m’adresse pour éclairer ma lanterne.

Ces réflexions sont dans le droit fil d’une lettre que j’ai écrit à un de mes professeur de philosophie (si ça vous intéresse : http://infra-virgilewest.blogspot.com/2007/11/paris.html).

Merci à vous.
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Cinderie



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MessagePosté le: Ma 25 Déc 2007 18:28    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour

Citation:
On se retrouve ainsi empaquetés dans des « il faut », des « tu dois », et autres murs rigides à la conscience


Il y a deux lectures (pour simplifier) dans la religion.Il y a l'étude des textes de type théologique,philosophique et ce qui est dit "au bon peuple" ,les il faut et tu dois sont un rempart protecteur il me semble contre ce torrent de pulsions sexuelles, voracité,violence dont il serait naïf de croire que tout le monde a assez d'intelligence pour distinguer le bien du mal lorsqu'il est en proie à son côté sombre . Donc les lois sont un bon début mais en les dépassant il arrive qu'on les contredise un peu lorsqu'on s'attache plus au fond qu'à la forme .

Citation:
. L’idée de l’interdit ne crée-t-elle pas le désir de transgresser cet interdit ?


Il nous est difficile de nous mettre par exemple à la place de ceux qui vivaient au moment de la loi du talion et considerer que celle ci est un progrès car elle permet de réparer une injure faite en respectant la stricte proportion du dommage subit .

Les interdits sont déjà transgressés depuis longtemps en particulier sur le plan sexuel ,la naiveté des femmes et des enfants dans ce domaine a surtout permis aux pulsions de s'exercer en toute impunité dans le secret des alcôves . Ne rien prescrire serait à mon sens revenir à l'obscurantisme période dans laquelle ceux qui "savent" peuvent exercer des pressions psychologiques sur ceux qui ne savent pas;Un ordre est avant tout une information donnée qu'il vaut mieux respecter. Elle est raccourcie ,abrégée ,il manque le "pourquoi" .
En bref il suffit de finir la phrase il ne faut pas faire cela "parce que",il te reste ensuite à étudier le motif pour comprendre et savoir s'il te "parle" ou pas.
Mais ce n'est que mon avis.

Citation:
comment parler de façon à établir une distinction entre l’avant et l’Après


Il me semble que beaucoup de ceux qui ont eu une révélation ont écrit très longtemps après cette révélation souvent des decennies après,ils ont fait l'expérience de l'unité mais n'ont réussi à en écrire quelque chose d'intelligent et de porteur qu'après de nombreuses années de travail et souvent après avoir beaucoup lu et médité . Il faut de très nombreux réveils à quatre heure du matin devant son clavier avant de pouvoir en parler ce qui est somme toute rassurant ,l'inspiratin pour la plupart ne vient pas du ciel. Il suffit de lire des écrits de personnes qui pratiquent l'écriture automatique suite à un éveil cela ressemble parfois à une pathétique diarrhée verbale.

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