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La Foi par Thomas Merton
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mauvaiseherbe



Inscrit le: 31 Mai 2006
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MessagePosté le: Ve 13 Oct 2006 12:57    Sujet du message: La Foi par Thomas Merton Répondre en citant

J'ai rarement lu quelque chose d'aussi clair pour parler de la foi et de tout ce qu'elle n'est pas .
Il y a eu ,bien sûr, des moments d'intense lumière , de communion , de compréhension , de signes et de prodiges où en paix et rassasiée j'ai nagé en pleine béatitude ...
Mais " l'obscurité" dont il est question ici m'est si familière aussi...


Foi
Thomas MERTON




Semences de contemplation Seuil 1952



Le commencement de la contemplation est la foi. Si, dans votre conception de la foi, se glisse quelqu'erreur essentielle, vous ne serez jamais un contemplatif.


Voici quelques unes des idées erronées touchant la foi.

Tout d'abord, elle n'est ni une sensation ni un sentiment. Elle n'est pas un élan aveugle et subconscient vers quelque chose de vaguement surnaturel. Elle n'est pas simplement un besoin élémentaire de l'esprit humain. Elle n'est pas une impression que Dieu existe. Elle n'est pas une conviction que l'on est, en quelque sorte, sauvé ou "justifié" pour la seule raison que l'on pense ainsi. Ce n'est pas quelque chose d'entièrement intérieur et subjectif sans aucun rapport avec un motif extérieur. Ce n'est pas quelque chose qui bouillonne et déborde des replis de votre âme et vous remplit d'une indéfinissable "intuition" que tout est pour le mieux. Ce n'est pas une chose qui vous soit si essentiellement propre que la satisfaction qu'elle vous procure soit incommunicable. Ce n'est pas quelque mythe personnel impossible à partager avec un autre et dont la valeur objective n'importe ni à vous, ni à Dieu ni à personne.

Mais ce n'est pas davantage une opinion. Ce n'est pas une conviction fondée sur l'analyse rationnelle. Ce n'est pas le résultat d'une évidence scientifique. Vous ne pouvez croire que ce qui ne vous est pas évident. Dès que vous en êtes certain, vous ne le croyez plus, tout au moins pas de la même façon, puisque vous en êtes certain.

La foi est tout d'abord un acquiescement intellectuel. Elle est un perfectionnement non une ruine de l'esprit. Elle met l'intelligence en possession de la Vérité que la raison ne peut saisir par elle-même. Elle nous donne une certitude au sujet de Dieu tel qu'Il est en Lui-Même: la foi est un moyen de prendre un contact vital avec un Dieu Qui est vivant. Elle n'est pas la conception d'un Premier Principe abstrait, tirée à grand renfort de syllogismes de l'évidence de la création.

Mais l'acquiescement de la foi n'est pas fondé sur l'évidence intrinsèque d'un objet visible. L'acte de croyance unit deux membres d'une proposition qui, selon notre expérience naturelle, n'ont aucun rapport entre eux. Pourtant il n'existe rien dans les limites de la raison prouvant qu'il n'y ait entre eux aucun rapport. Les affirmations qu'exige l'acquiescement de la foi sont simplement neutres à l'égard de la raison. Aucune évidence naturelle ne peut nous dire pourquoi elles seraient vraies ou pourquoi elles seraient fausses. C'est à cause de quelque chose autre qu'une évidence intrinsèque que nous adhérons à ces affirmations. Nous acceptons leur vérité en tant que révélée et le motif de notre adhésion est l'autorité de Dieu Qui nous les révèle.

On n'attend pas de la foi qu'elle donne à l'intelligence complète satisfaction. Elle la laisse suspendue dans l'obscurité, privée de la lumière qui lui est familière. Pourtant elle ne déçoit, ne renie ni ne tue l'intelligence. Elle l'apaise par une conviction qu'elle sait pouvoir accepter en toute raison sous la direction de l'amour. Car l'acte de foi est un acte dans lequel l'intelligence se contente de connaître Dieu en L'aimant et en acceptant dans Ses propres termes ce qu'Il dit de Lui-Même. Et cet acquiescement est parfaitement rationnel parce qu'il est fondé sur la nette évidence que notre raison ne peut rien nous apprendre de Dieu tel qu'Il est réellement en Lui-Même. Il est fondé aussi sur Dieu Lui-Même infinie réalité, et, par conséquent, infinie Vérité, infinie Volonté, infinie Puissance, infinie Providence, qui peut Se révéler avec une absolue certitude de quelque façon qu'Il Lui plaise, et peut certifier par des signes extérieurs Sa révélation de Lui-Même.

Enfin la foi est la seule clef de l'univers. La signification finale de l'existence humaine et les réponses aux questions d'où dépend notre bonheur ne peuvent être trouvées d'aucune autre façon.

Le Dieu vivant, le Dieu Qui est Dieu et non une abstraction philosophique, dépasse infiniment la portée de tout ce que nos yeux peuvent voir et notre intelligence comprendre. Quelle que soit la perfection que vous lui attribuez, il vous faut ajouter que votre conception n'est qu'une pâle analogie de la perfection qui est en Dieu et qu'Il n'est pas à la lettre ce que vous concevez par ce terme.

Lui Qui est infinie lumière est si prodigieux dans Son évidence que notre esprit ne peut Le voir que comme ténèbres. Lux in tenebris lucet et tenebrae eam non comprehenderunt. Si rien de ce que l'on peut voir ne peut être Dieu ni nous Le représenter tel qu'Il est, alors, pour trouver Dieu, il nous faut aller plus loin que tout ce qui peut être vu et pénétrer dans les ténèbres. Puisque rien de ce qu'on peut entendre n'est Dieu, pour le trouver il faut entrer dans le silence.

Puisque Dieu ne peut être imaginé, tout ce que notre imagination nous dit de Lui est, en fin de compte, un mensonge, et c'est pourquoi nous ne pouvons Le connaître tel qu'Il est à moins d'aller au delà de tout ce qui peut être imaginé et d'entrer dans une obscurité sans images, et sans ressemblance avec quelque créature que ce soit.

Et, puisque Dieu ne peut être ni vu ni imaginé, les visions de Dieu dont nous lisons le récit dans la vie des saints ne sont pas des visions de Lui, mais des visions à propos de Lui; car voir quelque chose n'est pas Le voir.

Dieu ne peut être compris que par Lui-Même. Si nous devons Le comprendre, nous ne pouvons y arriver qu'en nous transformant, pour ainsi dire, en Lui, de sorte que nous Le connaissions comme Il Se connaît Lui-Même. Et Il ne Se connaît Lui-Même par aucune représentation de Lui-Même. C'est Son Etre infini qui est la connaissance de Lui-Même, et nous ne Le connaîtrons comme Il Se connaît que quand nous serons unis à ce qu'Il est.

La foi est le premier pas dans cette transformation, puisqu'elle est une connaissance sans images ni représentations grâce à une identification d'amour avec Dieu dans les ténèbres.

Ce n'est pas par l'intermédiaire des sens mais dans une lumière directement répandue par Dieu que la foi atteint l'entendement. Puisque cette lumière ne passe pas par l'oeil, I'imagination ou la raison, sa certitude devient nôtre sans aucune ressemblance qui puisse être visualisée ou décrite. Il est vrai que dans sa forme expressive, I'article auquel nous adhérons représente des choses qui peuvent être imaginées, mais, dans la mesure où nous les imaginons, nous nous faisons d'elles une fausse idée et nous avons tendance à nous égarer. En un mot, nous ne pouvons imaginer la relation qui existe entre les deux termes de la proposition suivante: "En Dieu, il y a Trois Personnes et Une seule nature." Et tenter de le faire serait une grave erreur.

Si vous croyez, si vous faites un simple acte de soumission à l'autorité de Dieu proposant quelque article de foi, extérieurement, par l'intermédiaire de Son Eglise, vous recevez le don d'une lumière intérieure tellement simple qu'elle échappe à toute description, et si pure qu'il serait indécent de l'appeler une impression. Mais c'est une lumière véritable conférant à l'entendement humain une perfection qui laisse la science bien loin derrière elle.

L'obscurité même de la foi est une preuve de sa perfection. Elle n'est obscurité pour notre esprit que parce qu'elle dépasse de beaucoup sa faiblesse. Plus la foi devient parfaite, plus obscure elle se fait. Plus nous nous approchons de Dieu, moins notre foi se dilue dans la demi lumière des images et des concepts créés. Notre certitude s'accroît avec cette obscurité; mais non sans angoisse et non sans doute réel, parce que nous ne trouvons pas aisé de vivre dans un vide où nos facultés naturelles ne peuvent se reposer sur rien. Et c'est dans les plus profondes ténèbres que nous possédons Dieu le plus pleinement sur terre, parce que c'est alors que notre intelligence est le plus véritablement libérée des faibles lumières des créatures qui ne sont qu'obscurité en comparaison de Lui; c'est alors que nous sommes remplis de Son infinie Lumière, qui est pour nous pure obscurité.

C'est dans cette plus grande perfection de foi que le Dieu infini Lui-Même devient la Lumière de l'âme plongée dans les ténèbres, et la possède entièrement de Sa Vérité. Et, à ce moment inexplicable, la nuit la plus profonde devient le jour, et la foi se transforme en intelligence.
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mauvaiseherbe



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MessagePosté le: Ve 13 Oct 2006 13:09    Sujet du message: Re: La Foi par Thomas Merton Répondre en citant

Je retiens ce passage aujourd'hui :

Citation:

L'obscurité même de la foi est une preuve de sa perfection. Elle n'est obscurité pour notre esprit que parce qu'elle dépasse de beaucoup sa faiblesse. Plus la foi devient parfaite, plus obscure elle se fait. Plus nous nous approchons de Dieu, moins notre foi se dilue dans la demi lumière des images et des concepts créés. Notre certitude s'accroît avec cette obscurité; mais non sans angoisse et non sans doute réel, parce que nous ne trouvons pas aisé de vivre dans un vide où nos facultés naturelles ne peuvent se reposer sur rien. Et c'est dans les plus profondes ténèbres que nous possédons Dieu le plus pleinement sur terre, parce que c'est alors que notre intelligence est le plus véritablement libérée des faibles lumières des créatures qui ne sont qu'obscurité en comparaison de Lui; c'est alors que nous sommes remplis de Son infinie Lumière, qui est pour nous pure obscurité.

.
:eureka: heureux41
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mauvaiseherbe



Inscrit le: 31 Mai 2006
Messages: 336

MessagePosté le: Ve 13 Oct 2006 13:40    Sujet du message: résonnance Répondre en citant

C'est aussi en résonnance avec ces mots de joaquim, qui m'ont beaucoup touchée , que j'ai choisi ce texte .

joaquim a écrit:
Mais je ne crois pas qu’il faille leur(les évènements , les signes visibles ...) accorder trop d’importance, malgré leur valeur éminemment consolatrice. Ils ne sont que les marches qui s’adaptent à nos pas pour nous conduire au-delà de nous. J’ai payé cher ma loyauté envers les marches, plutôt qu’envers le but où elles menaient. Dieu n’est jamais en arrière de soi. Il est toujours devant.
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Ney



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MessagePosté le: Ve 13 Oct 2006 18:26    Sujet du message: Répondre en citant

Merci...

enpleur15 :bouquet:

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Ney

° Puisse l'être constamment en prière qui demeure en moi laisser émerger son cantique à tout instant. °
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mauvaiseherbe



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MessagePosté le: Je 19 Oct 2006 11:04    Sujet du message: Desert ou néant ? Répondre en citant

Embarassed
Ce choix de texte devait être prémonitoire,je croyais connaître alors l’obscurité : ce n’était rien .
J’ai si agréablement flirté, les derniers temps, avec la beauté des idées , des mots, des écrits des uns et des autres , et même des miens , que j’ai pris l’ état de douce exaltation qui en a découlé( comme un état amoureux ), je l’ai pris , coriace gourmande que je suis ,pour un aboutissement , peut-être même bien mérité .

Je suis sidérée de voir comment il suffit d’un peu de soleil (intérieur ou extérieur ) pour me réchauffer un peu les os, un peu de nourriture consistante (intérieure ou extérieure ) pour me satisfaire le ventre , pour que subtilement ( ?!) je commence à m’installer plutôt confortablement dans ce qui me semble alors être la Voie , Ma Voie …..

Je dois être honnête : ce texte est à deux doigts de m’irriter et il ne reste plus rien qui me paraisse assez solide pour que je m’y agrippe … c’est le désert ….habité bien sûr , puisque je couperais volontiers quelques cheveux en quatre et que je n’arrive toujours pas à arrêter de « chercher » ou « attendre »(quoi et comment??), même en râlant .

La mauvaise herbe profitant un peu du terreau et de l’engrais des voisines s’est pris pour une pivoine de Chine …et un lapin qui passait par là a grignoté toutes les petites pousses un peu hâtives qui faisaient sa fierté .

Il est dit que la foi , de la taille d’un grain de moutarde seulement , pourrait suffire …

Pardon donc si j'ai eu l'air d'avoir des certitudes ...

:fleur:

en plus je ne parle pas d'éveil , ni de philo , ni de littérature , ni de science , mais il y a si peu de monde pour bavarder dans le trou où j'habite ...

_________________
Et ce que je vous dis à vous, je le dis à tous : veillez !\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\"
(marc 13 33)
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feuille



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MessagePosté le: Je 19 Oct 2006 14:00    Sujet du message: Répondre en citant

Je vous comprend mauvaiseherbe, Smile cette post-irritation, comme un dégout de l'idée de soi, une "odeur de mort" dans notre perception, je la retrouve parfois... c'est terrifiant et à la fois, c'est vivifiant! Cela m'arrive avec les textes de Krishnamurti maintenant, ses textes qui m'ont pourtant accompagné après la bascule, ils sont venus en échos pour me rappeler avec force que je n'avais pas rêvé... mais maintenant, je suis parfois pris d'une grande insatisfaction, j'ai l'impression de lire un texte mort, qui se répète... toute la mécanique est visible et il n'y a plus ce charme de la 1er rencontre. Mais en fait, c'est vivifiant, parce que d'une certaine manière, cela nous incite à reprendre la marche!
Oh, cela me fait penser à Jourdain cité par Joaquim ici qui a écrit joliement à ce sujet...
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joaquim
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MessagePosté le: Je 19 Oct 2006 15:45    Sujet du message: Répondre en citant

C’est quelque chose que j’observe moi aussi toujours à nouveau: lorsque la félicité me visite, mes tentatives maladroites — et involontaires, cela se fait malgré moi — pour la maintenir sont déjà les premiers signes de son déclin. On ne peut pas être continuellement dans un état de félicité. La vie est faite de vagues; ne vouloir en avoir que les crêtes, ce serait avoir une vie plate. Mais lorsqu’on est dans un creux, qu’on se sent “déserté”, alors ne subsiste rien d’autre que la foi, sans autre soutien qu’elle-même; si on arrive à le voir ainsi, ce désert apparaît alors comme une bénédiction, car c’est ainsi seulement que la foi peut devenir pure ouverture, sans rien hors d'elle qui la justifie. Dans cette désolation-là germe la graine de la consolation.

J’ai toujours été touché par cette vérité astronomique: le 21 mars, au premier jour du printemps, lorsque le soleil s’apprête à s’élancer triomphalement vers le solstice d’été, c’est également le jour où se laissent déceler les premiers signes de son déclin: les journées, même si elles continuent à croître, croissent en effet de moins en moins vite à partir de ce jour-là, jusqu’à ce que finalement, au jour de l’apothéose de la lumière, le 21 juin, elles se mettent carrément à décroître.

C’est aussi ce que la tradition chrétienne a ressenti en fixant au solstice d’été la fête de Saint Jean-Baptiste, et au solstice d’hiver la naissance du Christ. Cf: la lumière à Vézelay et la Crucifixion du retable d’Issenheim.
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mauvaiseherbe



Inscrit le: 31 Mai 2006
Messages: 336

MessagePosté le: Je 19 Oct 2006 19:45    Sujet du message: Répondre en citant

Oui ,merci feuille , ta réponse me touche beaucoup.

J’avais lu déjà avec beaucoup d’attention et d’émotion ce texte de S.Jourdain et celui d’A. Voisard .

Devoir traverser ainsi ce désert me rend particulièrement sensible aux autres, à ce que chacun a à vivre intimement et dans une solitude qui ne peut être évitée …l’amour que je ressens pour les hommes et tous les êtres s’intensifie encore .

Je vois bien le lien aussi entre ces expériences et cette observation si juste de joaquim : la coïncidence d’un rythme de croissance constant vers le haut avec une vitesse toujours plus lente préparant déjà l’inévitable déclin…et ainsi de suite : une minutieuse horlogerie .

Même si je ne suis pas toujours capable de l’intellectualiser , c’est aussi parce que ces lois profondes sont partout perceptibles dans la nature , que j’ai tant besoin de ne pas être coupée d’elle …en son sein la compréhension et l’acceptation de ces lois n’est plus une ambition spirituelle , elle est comme je respire , comme respire le monde . Je suis un élément du tout , obéissant aux mêmes lois que les autres éléments … et bien ignorante de la science de l’Horloger .

Mais les humains sont capables par leur créativité de tant de merveilles , de tant de profondeur, joaquim …au désert les contrastes apparaissent de façon encore plus saisissante…

Merci beaucoup de m’avoir donné accès à celles là … je vais prendre encore du temps pour laisser résonner en moi ces images et ces symboles…pour les interroger .

Je n’ai eu aucune éducation , à peine un bain culturel constitué d’ailleurs de lambeaux moribonds de différentes cultures,et quoique je fasse pour intégrer et comprendre le langage de la tradition chrétienne qui m’est si chère , il me reste étranger … ce langage des symboles et des images est en fait le seul qui me soit peut-être accessible en vérité .

Bon j'y retourne :bouquet:
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Pierre



Inscrit le: 22 Nov 2005
Messages: 113
Localisation: Toulouse

MessagePosté le: Ve 20 Oct 2006 10:22    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour mauvaiseherbe,

Je me permets de te suggèrer quelque chose qui pourrait rendre ces moments d'obscurité un peu plus supportables. J'ai pour ma part bien donné cette année dans la fréquentation des gouffres, où chaque pas, chaque pensée, chaque émotion, chaque geste, s'ajuste exactement pour me faire descendre un peu plus au fond du trou. Bon, en fait quand on est hors du trou, on a une vision assez claire de la mécanique à l'oeuvre : chaque tentative de s'extraire de sa mélasse (fondamentalement irréelle) est une allégeance que l'on fait à celle-ci et donc la renforce. Mais quand on est dedans, même si on se rappelle cela, on ne peut pas s'empêcher d'agir, de penser, d'éprouver, et tout ce qu'on éprouve, c'est du mal-être, tout ce que l'on pense c'est "comment sortir de ce mal-être ? " suivi d'un bric à brac de choses à tenter et autre solutions miracles dont aucune ne fonctionne, et tout ce qu'on fait, c'est s'enfoncer davantage.

Il y a deux mois environ, j'ai lu quelque chose sur les mantras qui disait en substance que la récitation d'un mantra est une manière d'occuper son mental, de lui donner un os à ronger pour qu'il cesse de s'agiter, bref de le pacifier. Bon, un nouveau truc à essayer, me suis-je dit, mais au point ou j'en étais, qu'avais-je à perdre. Je me suis donc trouvé une phrase adéquate a répéter ( en piochant dans la liturgie chrétienne), et j'ai mis en route la machine. J'ai répété autant que j'ai pu cette prière, sans forcer, sans me faire violence. Le bénéfice m'est apparu très rapidement ( le soir même ). Cette activité mentale laisse peu de place à la production de nouvelle pensées et carrément aucune place à un discours construit qui pourrait naitre de ces pensées, notamment celui qui consiste à chercher le sens de ce que l'on traverse (parce que moi aussi figure-toi, je suis - pour mon grand malheur - un intrépide chercheur de sens) . Chaque question, chaque doute, chaque commentaire sur sa pratique obtient toujours la même réponse évidente : la prière que l'on fait tourner dans sa tête. On ne s'occupe plus du gouffre dans lequel on patauge et il finit par disparaitre. Bon, après ce n'est pas non plus le retour en grâces, c'est juste un retour à un ordinaire tout à fait supportable.
Je ne sais si cela te sera utile. En tout cas, reçois toute ma sympathie et mes voeux de prompt rétablissement, (si je puis dire).
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mauvaiseherbe



Inscrit le: 31 Mai 2006
Messages: 336

MessagePosté le: Ve 20 Oct 2006 17:11    Sujet du message: MERCI Répondre en citant

Cher Pierre , comme je suis heureuse de te lire !

C’est exactement la forme de prière qui m’est apparue me convenir le mieux il y a 3 ou 4 ans je ne sais plus .
La prière du cœur , celle qu’on rumine comme une vache paisible dans son pré ,celle qu’on ronronne comme un chat qui se détend ou qui cherche à être rassuré. Elle est celle qui rappelle doucement à la pensée de descendre jusqu’au cœur , sans jugement sur son contenu ou sa qualité …lui rappelant avec modestie le vœux que j’ai fait un jour lointain : veiller .

Elle convient bien aussi à la mendiante que je suis .

As-tu déjà entendu la nuit , ces tous petits bruits qu’émettent les oiseaux dans les buissons ou les arbres ? Petits sifflets brefs et minuscules, à peine audibles pour nous, comme des bips espacés qui se répondent … maintenant ainsi un contact pourtant bien dérisoire au sein de l’obscurité pleine de danger et livrée aux intempéries .
S’il m’arrive de comprendre le sens de la phrase (du mantra) que j’ai choisi , c’est très loin d’être fréquent ; il arrive même qu’elle soulève toutes sorte de réactions comme la colère parce que « personne » n’entend, la nausée parce qu’elle devient miroir, le refus parce qu’elle paraît absurde.
Mais je continue à pépier dans la nuit, comme je respire .

En fait dans ce désert se ne sont pas mon mal-être(j’ai toujours été à l’étroit dans ma carcasse de toute façon !) , ou une souffrance qui m’occupent . Il y a même en moi, depuis quelques temps , des changements qui tiennent du miracle .
Trois choses continuent réellement à me poser problème : l’absurdité de la bêtise humaine, cause de tant de souffrances inutiles (ça me paraît être d’un non sens absolu) ,le fait que je ne trouve pas de réponses claires et satisfaisantes à mes questions, comme toi , relatives au sens, et le fait que je sois viscéralement incapable de « croire » .

Je me tiens en tout cas debout et j’irai par là où il me faudra passer …Incha’Allah .

Avec vous tous , je me sens quand même incroyablement privilégiée , puissent tous les autres l’être autant .

Une belle pensée pour Ney .
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joaquim
Administrateur


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Messages: 1421
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MessagePosté le: Sa 21 Oct 2006 2:51    Sujet du message: Répondre en citant

Le désert n'est pas une étendue qu'il faille traverser pour trouver, au-delà, la source. Non, il est invitation à déposer tous nos habits, à nous dépouiller de nous-mêmes: elle est là, la source, sous le reflet de soi.
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Ney



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Messages: 69
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MessagePosté le: Sa 21 Oct 2006 11:33    Sujet du message: Répondre en citant

Mhhh... vos mots sont doux pour le coeur, ils avivent en moi la Flamme.

Le désert, ce fameux désert...
Lorsque la nuit est tombée sur le sable, mais que subsiste dans notre main ou dans notre coeur la lueur d'une lanterne, cette marche infinie vers l'horizon est agréable, dans sa pauvreté, dans son austérité.

Seulement, comme vous le savez si bien, la Bouche qui Souffle la vie aime également souffler la vacillante lueur de la lanterne.
Se retrouver dans l'obscurité, face à ses propres Moi défigurés qui ne cessent de nous hanter, de nous demander à manger, de nous demander la lumière ralentit la marche, alourdit le corps.

Il est incroyable de constater toute l'énergie que l'on disperse pour essayer de retrouver une étincelle de lumière pour y voir à nouveau.
Alors qu'il suffit de s'asseoir et d'attendre la venue de l'aube.

Je suis perplexe face à ce mystère.
Cette contradiction inhérante à toute vie. Nous avons tout, tout au fond de nous, et pourtant, lors des douloureuses descentes dans le désert, c'est comme si nous n'avions plus rien et que nous mourrions de faim.

Mais Celui qui nous plonge dans l'aridité sait ce qu'il fait, qui ne s'est jamais senti plus "clairvoyant" après un long cheminement dans la nuit ?

Hum... la Vie est une chose bien étrange, vous ne trouvez pas ?
Mais c'est dans ses apparentes contradictions que se révèle sa Toute Beauté, sa Perfection...

Je reste songeuse.

_________________
Ney

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phoeniks



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Messages: 51

MessagePosté le: Sa 21 Oct 2006 19:34    Sujet du message: Répondre en citant

Décider de poster un message me serre un peu la gorge et fait trembler mes doigts sur le clavier.
Depuis quelques temps il me devient difficile d’écrire sur ce forum. Parce que ce que j’ai pu y lire a fortement réagi en moi, créant un phénomène dont vous témoigner si bien dans ces messages sur la foi. Je ne voudrais pas créer de méprise, ce ne sont pas vos écrits qui sont à l’origine de la réaction, tout au plus en sont-ils le catalyseur, voire la coïncidence.
J’ai osé lire un peu quelques post depuis quelques semaines, mais sans trop m’y attarder.
En vous lisant aujourd’hui, j’ai les yeux humides parce que la résonance est forte.
Je suis toujours surpris du caractère abrasif de certains mots.

Je n’ai pas souvenir que le creux de la vague ai été aussi profond. Et même si « ne subsiste rien d’autre que la foi », le fil qui me rattache à elle est ténu. Je n’ai jamais été si proche de la perte. Et pourtant…..
Pourtant, comme souvent par le passé, mon instinct de survie fonctionne bien.

Oui, Mauvaisherbe, moi aussi j’essai de me tenir debout et j’irais par là où il me faudra passer. Parfois mes jambes flageolent alors je m’assied sur une pierre au bord du chemin et j’essai de comprendre ce que veut dire lâcher prise. Je pense à ce que tu dis Pierre : « chaque tentative de s’extraire de sa mélasse est une allégeance que l’on fait à celle-ci et donc la renforce ».

J’espère que vous me pardonnerais le côté un peu confus de tout ça.

Merci pour ce que vous avez écrit.
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mauvaiseherbe



Inscrit le: 31 Mai 2006
Messages: 336

MessagePosté le: Sa 21 Oct 2006 20:09    Sujet du message: Répondre en citant

Oui phoenix, je comprends .


Mais c'est vrai qu'il n'y a sans doute rien à traverser et j'ai très envie de croire que la source est là audelà de la vanité ...oui j'y crois .

Je ne sais pas, pourtant, me dépouiller toute seule...alors j'accepte le désert comme une aide ...j'espère .
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Ney



Inscrit le: 08 Juil 2006
Messages: 69
Localisation: Fribourg, Suisse

MessagePosté le: Di 22 Oct 2006 11:36    Sujet du message: Répondre en citant

Phoeniks, est-ce le chant de l'automne qui résonne plus que jamais dans ton coeur ?
Est-ce ce vent froid qui glace tes racines et fait tomber tes feuilles ?

Ces instants de perte sont cruels et difficiles à vivre...
Le désir affamé de retrouver l'étincelle de pureté qui est en nous, la panique de ne pas y arriver, la peur, l'impression de n'avoir prise sur rien, essayer de s'accrocher, se sentir submerger, se noyer dans l'eau, étouffer sous les voiles, ne plus y voir clair...

Nous sommes les fruits de la vie, et par conséquent nous vivons comme elle le cycle des saisons...
Les feuilles qui tombent servent à nourrir la terre, l'arbre dénudé s'en va vers une nouvelle vie, après la violence de l'hiver.

C'est... difficile à accepter, à vivre pleinement en tant que tel.

Je te comprends, et toi aussi Mauvaiseherbe.

Vivre cette "souffrance d'être" avec vous me donne de l'espoir, un espoir infini, géant, et si minuscule tout à la fois.

*souris doucement*

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Ney

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